Écologie politique
L’APN est en train d’expédier les projets de loi devant être passés avant la fin de l’été. La majorité est conçue pour assurer la diligence nécessaire à la production des lois nécessaires au fonctionnement homogène du pouvoir.
Après le bilan-programme du gouvernement, c’est au tour de la loi électorale d’être adoptée. Quel meilleur moment que cette veille de congés pour faire voter une loi qui doit prolonger les vacances politiques en reportant au plus loin les élections locales ?
Cette bienveillance parlementaire nous rappelle, maintenant que le parc d’El-Kala est provisoirement sauvé de la bitumeuse partition, l’intervention “spontanée” de ce député de la région qui, en cours d’examen du programme de gouvernement, se montrait impatient de voir réalisée la tranche d’autoroute qui devait traverser la prestigieuse réserve nationale.
Souvenons-nous, en effet, de cet élu d’El-Tarf, circonspection administrative et électorale qui abrite le parc, prenant la parole pour réclamer le lancement urgent des travaux de réalisation du segment d’autoroute. Avec force arguments de retombées sur l’économie, l’emploi et le développement de la région, l’élu de la nation défendait l’utilité, mais aussi l’urgence d’une telle œuvre.
C’est en écoutant de telles interventions qu’on mesure le décalage mental entre la société et ceux qui sont censés la représenter. Et qu’on comprend l’écart entre la représentation et… la représentativité.
Pendant que du côté d’El-Tarf, d’El-Kala, de Annaba, d’Alger, mais aussi de New York, de Sidney et d’ailleurs, le monde s’inquiétait du crime contre la nature qui allait se commettre, pendant que les experts de l’Association pour le développement durable de la région d’El-Kala et de l’Institut national d’agronomie formulaient la démonstration scientifique du gâchis annoncé, notre député haranguait gaillardement l’Exécutif pour que le massacre commence sur-le-champ.
À l’évidence, le parlementaire fraîchement élu ou réélu n’avait pas le souci de son environnement social et encore moins de son environnement tout court. Une seule fin le mouvait peut-être : renvoyer l’ascenseur à un pouvoir qui lui a permis de siéger à l’hémicycle, au moment où ce pouvoir est mis en difficulté par une opinion qui, parfois, parvient à la limite de sa complaisance.
C’est peut-être cette facilité des élus à souscrire, ou même à consentir en silence, est caractéristique d’un système où la légitimité électorale est conçue comme un simple appoint à la cooptation autoritaire des candidats. Les partis gagnants sont connus d’avance et les mieux classés des partis les mieux lotis sont connus d’avance aussi. Les dirigeants, qui confectionnent les listes, se confondent avec le pouvoir. L’élection est de leur pouvoir.
Quand on n’est qu’un élu, on passe son temps à rendre la politesse pour mériter l’actuel mandat ou s’assurer le prochain. Ce paradoxe entre le statut précaire de l’élu et la toute-puissance de l’Exécutif annule l’effet démocratique du vote et pollue la vie politique nationale.
Les électeurs le perçoivent et perçoivent leur fonction de faire-valoir. Et la distance qui sépare leurs préoccupations des stratégies de carrière de leurs élus. Ils ne sont plus que deux sur trois à se déplacer aux bureaux de vote.