LE BUSINESS ET NOUS !
«Visite-marathon de Abdekka à Blida. Sur un rythme d’enfer, il a marqué 35 escales dans cette wilaya.»
Il va finir par nous tuer tous !
Cette poire est pourrie. Oui ! Hakim a raison, cette poire est pourrie. Non ! Hakim n’a pas raison, cette poire n’est pas pourrie. Je crois que la virée blidéenne de Abdekka est révolutionnaire. Révolutionnaire dans ce qu’elle amorce comme virage effectif, réel dans le monde de la presse. Ce que d’autres expérimentent depuis quelques années déjà, le pouvoir de l’argent dans et sur les médias, nous commençons à vraiment le sentir et le ressentir dans nos rédactions.
L’argent, l’intérêt capitalistique en tant qu’entrant dans la fabrication d’un journal, nous y sommes. J’allais presque dire «nous y sommes enfin !» tant la situation prévalant jusque-là était hybride, bâtarde, floue. Blida aura révélé qu’une ligne éditoriale n’est plus le fruit d’une concertation de journalistes, lors d’un briefing de journalistes, mais bien le résultat du calcul froid d’un état-major industriel tablant, à travers l’angle de couverture sur les retombées futures, les retours d’investissements placés dans 24 ou 32 pages. C’est une ère nouvelle pour la profession en Algérie.
Un chef d’Etat, un exécutif ne sont plus scannés à travers les grilles de lecture du journalisme, mais bien plutôt à travers les larges et indulgentes mailles des capitaines d’industrie détenteurs des titres en question. Bien ? Pas bien ? Je ne suis pas juge. Je remarque juste que des profils honnis il y a quelques mois de cela passent aujourd’hui pour des figures emblématiques, des icônes qu’il faut absolument promouvoir.
Je remarque aussi qu’en plus d’être déjà otages d’un cadre professionnel pas très ragoûtant, de conditions de travail parfois précaires et de parachutes sociaux vachement troués, les journalistes, surtout celles et ceux qui débutent vont devoir composer avec des règles du jeu fixées dans le monde de la finance, pas dans leurs réunions de rédaction.
L’exemple Sarkozy, en France, et les liens du président avec les gros groupes médiaticofinanciers inquiètent déjà depuis un certain nombre d’années les professionnels français et européens de la plume. Depuis quelques mois, et de manière plus accrue depuis la visite de Abdekka à Blida, il y a une amorce en ce sens. Une amorce troublante de similitude. O bien sûr, nous n’en sommes pas encore au yacht de Bolloré. Mais…Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.
Hakim Laâlam