Le 5e pouvoir
La justice est-elle une affaire de courage ? Probablement, puisque les réseaux étant à ce point solidement constitués, fait que s’attaquer à un wali ou à un puissant revient à s’attaquer à toute une organisation. Dans une sortie médiatisée, M. Aïdouni, SG du syndicat des magistrats, a eu le mérite de cerner le problème.
La justice est au centre du pouvoir ; régler son problème règle beaucoup de problèmes. En gros, il y a quatre pouvoirs : le premier est l’Exécutif et les trois autres sont en fait des contre-pouvoirs, le législatif, le judiciaire et le médiatique. L’Exécutif étant une somme de ministres fidèles ou craintifs, voire les deux, l’Assemblée une addition globale de servants à main levée, reste le judiciaire, aux ordres des groupes d’influence constitués, reste le reste du reste, le médiatique, qui vit encore dans la peur quand il n’est pas lui-même impliqué dans les collusions.
A ce titre, la limite du discours de M. Aïdouni est évidente puisque l’on se rappelle tous d’un autre courageux de la magistrature, ex-secrétaire du syndicat, Tayeb Louh, qui depuis qu’il est devenu ministre ne fait que gérer les affaires courantes. Oui, le pouvoir corrompt et complique le problème.
Comment le régler ? En tant que président et premier magistrat du pays, Bouteflika, chef du 1er et du 3e pouvoir, voire du 2e et du 4e, peut tout faire. Mais vu qu’il a visiblement du mal à organiser les pouvoirs et instaurer un ordre juste, il a choisi, par aveu d’impuissance, de tout concentrer entre ses mains, ce qui ne règle rien.
Qui peut alors régler les problèmes, d’autant qu’en Algérie, il y a un 5e pouvoir, intimement impliqué aux autres, qui s’appelle le pouvoir occulte ? Personne. Alors Dieu ? Ce n’est pas un pouvoir, mais une projection mentale des pouvoirs. Qui alors ? Personne. C’est ce qui s’appelle un pays féodal, civilisationnellement en retard.
Chawki Amari