Construction du Maghreb : rien ne va plus

On peut toujours continuer à rêver les yeux ouverts en faisant comme si le processus de construction du grand Maghreb est encore en œuvre, qu’il concurrence même celui de l’Union européenne. On peut quand même continuer à rêver. C’est facile à faire quand l’imagination voit autre chose que ce que voient les yeux. Plus personne n’y croit à ce projet. Peut-être que cela deviendra une réalité plus tard, à l’extinction des générations actuelles au pouvoir dans les pays du Maghreb.

Un Maghreb des peuples ? Il n’y a jamais eu aucune consultation populaire. Des peuples à unir sans liberté de circulation, sans possibilité d’un marché du travail maghrébin ? Une rente politique ou politicienne pour les dirigeants ? Un Maghreb de l’économie ? un Maghreb de la défense ? Un Maghreb de la sécurité ? Une politique extérieure commune ?

On a bien vu qu’il avait fallu se rencontrer à Tripoli pour discuter de l’UPM et encore, aucune position commune, ce qui reviendrait à se demander pourquoi n’avoir pas fait l’économie de la démonstration qu’il n’y a rien de commun pour faire un bout de chemin ensemble. Même la géographie a échoué à leur imposer ses déterminants pour leur intégration dans le même espace géopolitique.

Une fois pour toutes, il faudrait reconnaître que les dirigeants des pays du Maghreb ont échoué à donner un contenu réel à leurs discours maghrébins, ou à concrétiser des aspirations de leurs peuples puisqu’il est souvent répété qu’il s’agit de construire un Maghreb des peuples, pour les peuples, mais pas par les peuples.

Le comble est que les cinq pays en solitaires rencontrent au sein du groupe des «5+5», cinq pays soudés qui ne peuvent prendre des engagements qu’en se référant à l’ensemble des pays européens. Bien sûr, il n’est pas question d’enterrer le projet, mais force est de reconnaître que plus rien ne va dans le sens de la construction du Maghreb.

Le reconnaître, c’est déjà faire un pas vers la recherche d’un vrai traitement. Il en est également de même pour la «ouma» arabe. On continuera encore dans quelques décennies – ou disons quelques demi-décennies – à faire vivre le rêve de la nation arabe, du Maghreb arabe, dans un contexte international où il ne restera plus que les pays arabes à ne faire partie d’aucune entité régionale soudée et intégrée.

23-06-2008
Sofiane Idjissa

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