Aux limites de la planète
«Jour essentiel pour les gens qui ont faim dans le monde», affirmait hier le rapporteur de l’ONU pour le droit alimentaire, Jean Ziegler. Voire! Une partie du monde a faim. C’est évident! Les alertes et mises en garde des spécialistes ont été prises à la légère par ceux-là mêmes qui, directement ou indirectement, ont contribué d’une manière ou d’une autre à la dégradation de la situation de la planète rendue incapable de subvenir aux besoins alimentaires de la population. Il fallut que de nombreux peuples, notamment en Afrique, se trouvent aujourd’hui au bord du précipice - et surtout la crainte des répercussions sur les pays riches - pour que les «décideurs» du monde daignent enfin se pencher sur une crise récurrente.
Ainsi, le ban et l’arrière-ban de la communauté «bien-pensante» internationale se réunissait hier à Berne en Suisse, à l’initiative du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, pour essayer de trouver une issue à une crise prise, le moins qui puisse être dit, sur le tard, alors que les émeutes de la faim sont devenues quotidiennes dans de nombreuses régions du monde. Or, ce sont ceux-là qui sont pour quelque chose dans l’aggravation de la situation alimentaire, les dérèglements et le dysfonctionnement général affectant la production céréalière et des cultures vivrières - l’OMC, le FMI et la Banque mondiale (BM) - qui prétendent remédier aux dégâts qu’ils ont déjà commis de par le monde. L’envolée des prix dans l’agroalimentaire est l’une des conséquences du libéralisme outrancier préconisé par ces organisations.
Comme était pénalisant pour les pays pauvres, le surcoût du service de la dette. Il y a quelques années, l’Ocde (Organisation de coopération et de développement économique) affirmait dans une étude, très peu médiatisée, que pour 1 dollar prêté par le FMI ou la BM, les pays débiteurs remboursaient entre 3 et 5 dollars. En d’autres termes, les pays pauvres finançaient la croissance des pays riches alors qu’eux-mêmes s’enfonçaient dans la misère et étaient exclus du partage de la prospérité. Jean Ziegler pointe ainsi du doigt l’OMC qui, selon lui, en tentant de conclure le cycle de Doha, joue contre «les intérêts des peuples martyrs de la faim». Le Secrétaire général de l’ONU a également mis à l’index les efforts de l’OMC dans les négociations de Doha, qui sont contraires, affirme-t-il, aux intérêts des «plus pauvres».
Le trou d’ozone qui menace la stabilité de la terre avec le dérèglement climatique et le réchauffement de la planète, qui ont des effets négatifs, souvent destructeurs, sur le potentiel agricole mondial, sont aussi le fait des pays industrialisés, plus enclins à la recherche de leur confort, au détriment de l’équilibre écologique de la planète, peu soucieux de préserver une planète arrivée aux limites de ses possibilités nutritionnelles.
N. KRIM