Sauver sa part (de République)

Une des vertus des saisons électorales est que les prétendants sont contraints de se concevoir des programmes et de s’inventer des particularités. La règle s’impose surtout à ceux qui convoitent une place contre, ou à côté, des forces qui occupent déjà les institutions. Même si, souvent, leur ambition n’est que de prendre une part au pouvoir en place, ils doivent s’inventer des particularités pour ne pas avoir à concourir en clones politiques d’un personnel déjà aux affaires.

Il faut se différencier, en effet, pour donner quelque crédibilité à sa candidature qui, au fond, s’adresse plus au pouvoir qu’aux électeurs. Ces projets pour la forme s’endossent d’autant plus aisément qu’en l’absence de démocratie, c’est celui qui s’exprime qui décide du sens des mots, pas celui qui l’écoute. La communication à sens unique a fini par désintéresser la population de la chose politique, mais n’a pas encore découragé le carriérisme des politiciens.

Qu’importe alors que le résultat électoral ne dépende ni du discours du candidat ni du choix de l’électeur, mais d’une répartition concoctée en laboratoire !

Ainsi par exemple, à telle occasion, s’organise la défense de la République. Pas moins. Et les électeurs ignoraient que la République était en danger. Ils ignorent encore moins qui a mis la République en danger et depuis quand.

Si le péril est récent, les votants auraient sûrement aimé savoir quelle soudaine menace pèse sur le pays. S’il est plus ancien, ils auraient certainement préféré pourquoi faudrait-il une échéance électorale pour réveiller le patriotisme républicain. L’Algérie endure le même régime depuis au moins huit ans, un régime qui assume une politique d’une incontestable constance. Si claire, si populaire qu’elle se résume en deux mots à l’audience quasi unanime : la réconciliation nationale.

Il n’est donc pas crédible de se présenter en défenseur de la République si la démarche résolument suivie par le régime depuis des années ne nous a pas préalablement disconvenus. Ne l’ayant pas contestée et ne la contestant toujours pas, il devient absurde de s’avancer avec une contre-proposition qui ne remplit pas le préalable de la remettre en cause, ne serait-ce qu’en partie. Cela reviendrait à dire : l’Algérie a la politique qu’il faut, mais nous proposons une démarche pour sauver l’Algérie.

La menace islamiste est certes réelle. Mais n’est-ce pas que le régime a une solution imparable contre le péril intégriste et sa nuisance terroriste ? Ou bien il s’agit d’insinuer que cette démarche met justement la République en danger, mais qu’on n’a pas le courage de le dire ainsi, parce que c’est ce pouvoir, en fait, qui fait les “élus” et non les électeurs.

Alors, on s’invente un danger qui menacerait la République et qui n’aurait rien à voir avec la politique suivie par le régime en place. Et un slogan qui dure ce que dure une campagne électorale.

Chacun semble vouloir sauver sa part, disons, de République. Le temps qu’une pétition jaunisse et, feuille morte, est emportée par les résultats préfabriqués d’une consultation qui, somme toute, se passe dans la réconciliation. Celle que la rente plus convaincante que toute charte impose au sérail.

Mustapha Hammouche

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