Le retour des vieux démons ?

La protestation générale des lycéens a caché une niche : celle des candidats recalés en juin 2007 et qui sont, en principe, tenus par les anciens programmes. Un père, inquiet que les nombreux cas semblables à celui de son fils ne sombrent dans l’oubli, me le rappelle. C’est qu’elle inquiète cette histoire de réformes enclenchées les unes après les autres sans que personne ne sache exactement ce qu’elles poursuivent comme buts et de quelles conceptions du monde et de quelle philosophie elles s’inspirent ou procèdent.

Pour les lycéens logés dans cette niche, 2008 sera l’année de la fin inéluctable de leur scolarité ; positive s’ils accèdent à l’université, négative s’ils échouent aux épreuves du bac. Pour cette catégorie, cette année scolaire ressemble fort au quitte ou double mais avec cette impression qu’ils ferment le cycle tranquille, qui de 1986 à 2008, a cahoté l’enseignement secondaire entre les agressions multiformes du terrorisme et l’indifférente quiétude d’un autoritarisme conforté dans son bon droit et dans son sentiment de puissance par le silence social d’une jeunesse en proie aux traumatismes que vous savez et d’enseignants montés en première ligne de la résistance civile à la barbarie terroriste en payant de la vie de nombre de leurs collègues.

Ces périodes de silence social induisent toujours en erreur les hommes qui tiennent le pouvoir, plus attentifs aux dangers immédiats de la contestation violente qu’aux justes aspirations des hommes, des femmes et des jeunes qu’ils ont sollicités pour faire face à un danger aussi terrible pour la société en général que pour le pouvoir en particulier et qu’ils ont affronté en commun avant de s’apercevoir les uns et l’autre qu’ils n’agissaient pas pour les mêmes raisons quand le pouvoir, une fois défait le bras armé de l’islamisme politique, revenait à son ancienne idée de faire de ce celui-ci son «bras idéologique» pour contenir, uniment, les aspirations des jeunes et des travailleurs et les courants de gauche.

De ce point de vue, nous nous retrouvons, dans un mouvement politique régressif, dans des circonstances analogues à celles qui ont précédé Octobre 88 sauf que cette fois-ci il n’est, nulle part, de «gauche» massivement présente ou active mais d’enseignants, de fonctionnaires, de lycéens, de harragas, ne se mobilisant que pour de strictes questions sociales sans le moindre soupçon de la moindre inspiration par une «main» politique. Le pouvoir est face à un mouvement social «pur», rien que social à qui il refuse le moindre espace de négociation et de compromis.

Un ami constantinois me rappelait qu’en 1986, la ministre de l’Education de l’époque avait tenu les mêmes propos que Benbouzid face à une fronde lycéenne constantinoise : menaces de sanctions et d’exclusions. Les nouveaux groupes qui avaient conquis le pouvoir en évinçant les courants socialisant et anti-impérialistes ne tenaient pas à laisser discuter leur pouvoir si fraîchement acquis. La fronde constantinoise vite réprimée annonçait la fermeture du pouvoir en octobre 88. Espérons que nous ne sommes pas dans la même configuration et face à un pouvoir qui aurait opté pour une gestion par secousses sismiques des revendications de la société.

MOHAMED BOUHAMIDI

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