Union
Décréter la fin des guerres au lendemain d’un conflit majeur relevait peut-être du rêve que des hommes ont décidé de partager. Et il n’était pas facile durant ces années-là de mettre face-à-face des ennemis que l’on disait irréductibles. Trop de sang les séparait, et pourtant l’Europe existe.
Qu’elle s’appelle union du fer et du charbon, ou plus simplement Union européenne, le rêve s’est concrétisé il y a exactement cinquante ans. De nombreuses étapes ont été franchies depuis le fameux Traité de Rome qui institua l’Europe unie. Ce n’était pas facile, mais le résultat, peut-être pas tout à fait au niveau des espérances, est probant.
Et cela ne s’est pas fait sans heurt. On n’en veut pour preuve que la montée des nationalismes qui ont fait échouer l’adoption du Traité constitutionnel. Et dire que même parmi les plus fervents Européens, il en est qui imposaient de réelles limites. Des souverainistes ? Pas tout à fait, mais selon eux, trop d’Europe est également mauvais. Quel juste milieu alors ?
Mais existe-t-il réellement ? Il ne s’agit toutefois pas seulement de partager une monnaie, car l’Europe cache mal en vérité ses divisions. Comme à propos de sa constitution à supposer qu’il y en ait une un jour. Ou encore de son élargissement, divergences étalées au sujet de la demande d’adhésion turque. Est-ce un club chrétien finit-on par s’interroger ?
Les réponses ne sont pas convaincantes, mais elles tendent à conforter cette impression, surtout que des Etats membres faisaient pression pour que la question de la religion figure au moins dans le préambule. On reconnaîtra à certains leaders le mérite de la clarté, mais d’autres trouvent plus commode de s’abriter derrière un artifice juridique qui rendrait légal un refus de l’adhésion de la Turquie.
Toute nouvelle adhésion sera soumise à référendum, lit-on dans le texte. Ils ont réponse à tout les Européens. Comme pour Maastricht, ce fameux Acte unique qui a substitué l’Union européenne à l’ancienne CEE (Commission économique européenne), mais qui a transformé l’Europe en citadelle refermée sur elle-même. L’Europe, par ailleurs, même si elle a fait le bonheur de certains de ses membres par la politique de mise à niveau, ne correspond pas toujours à l’image que l’on s’en fait. Pas de politique étrangère ou de défense communes.
La guerre du Kosovo en 1999 a été menée avec les moyens des Etats-Unis. La guerre en Irak a, quant à elle, favorisé l’émergence d’une « nouvelle Europe », par opposition bien entendu à la « vieille Europe ». Mais cela n’est pas évident pour tout le monde, car tout est question d’intérêt. Et l’Europe à ce sujet semble bien connaître le sien.
T. Hocine