Les cordes de l’Observatoire

Quelques jours avant leur fête, des enfants des quartiers populaires auraient demandé au président Bouteflika la création d’un Observatoire des droits de l’enfant. J’écris «auraient» car je doute de la «spontanéité» de l’acte dans l’état actuel de notre société et de notre système politique. N’allez quand même pas penser qu’il s’agit de la manœuvre d’une ou de plusieurs personnes visant à créer une institution juste pour en occuper les postes au prétexte qu’un Observatoire des droits de l’enfant serait la cerise sur le gâteau, l’aboutissement d’un long et sérieux travail au profit des enfants.

Nul n’est obligé de commencer par le bas, de creuser les fondations avant de placer le toit, de prendre l’échelle pour atteindre les terrasses. Pourquoi se soucier du nécessaire quand on peut avoir, si vite, le superflu ? Car bien sûr, un Observatoire serait plus que superflu dans une société et avec un Etat qui auraient intégré, jusque dans leur inconscient collectif, l’idée que l’enfant est une personne et une personne particulière du fait de sa vulnérabilité et de ses moyens de défense limités.

Car à quoi peut servir un Observatoire des droits de l’enfant si n’existent pas dans la législation les textes qui définissent les normes par quoi on peut mesurer les écarts et les transgressions. Un Observatoire sans référents juridiques va observer quoi ? Ce que nous voyons tous les jours : des enfants livrés à la mendicité et au marchandage des mendiants professionnels, des enfants et leurs mamans abandonnés pour cause de divorce trop facile et de minorité à vie de la femme, des enfants qui ont accès difficilement au lait et au pain dans leurs familles, des millions d’enfants ployant sous des cartables trop lourds pour leurs épaules car on a choisi de leur bourrer le crâne au lieu de leur former la tête, des millions d’enfants en perdition scolaire parce que le pouvoir les a privés de l’égalité des chances, etc. etc.

Bien sûr, le pouvoir peut accepter d’ajouter à sa galerie des colifichets démocratiques un Observatoire des droits de l’enfant. Nous aurons alors droit à un intervenant supplémentaire sur les ondes radio et télé, une fioriture de plus, l’affichage d’une satisfaction béate en prime ou en dessert politique qui voudra nous convaincre que le pouvoir fait beaucoup pour les enfants en refusant de faire pour leurs mamans. Vous n’y croyez pas ? Pourtant, ils sont vrais ces enfants qu’on laisse attendre un responsable sous le soleil de plomb ou dans le froid coupant. Interdire l’exploitation politique des enfants, interdire de les amener dans des trucs politiques c’est dans les cordes de cet Observatoire ?

MOHAMED BOUHAMIDI

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