La réconciliation nationale appliquée à la diplomatie

Après la visite du ministre soudanais de l’Industrie, l’Algérie s’est engagée à initier une procédure de saisine du Conseil de sécurité à l’effet de suspendre les enquêtes et procédures sur la responsabilité du président Omar El-Bachir dans le génocide du Darfour.

C’est peut-être l’occasion de rappeler “la dette” que détient le régime soudanais auprès de notre pays, et qui lui vaut cette solidarité diplomatique.

À partir de 1996, le Soudan, contraint par la pression internationale, a dû multiplier les gages de son désengagement du terrorisme. Il livrait alors Carlos à la France et fermait quelques-uns des nombreux camps d’entraînement de terroristes, notamment dédiés au GIA.

Son illustre hôte du début des années 1990, un certain Oussama Ben Ladden, outre qu’il y faisait prospérer ses affaires dans le BTP, y finançait plusieurs camps d’entraînement dans la banlieue de Khartoum et dans la province de Damazie. Plus de mille cinq cents “Afghans” algériens y séjournèrent avant de rentrer sévir dans leur pays par la “filière du Sud”.

Nul besoin de détails factuels pour établir le rôle du Soudan dans le déclenchement et le développement du GIA : l’État algérien qui, en avril 1993, avait rappelé son ambassadeur à Khartoum en même temps qu’il rompait ses relations avec l’Iran, a nécessairement fondé sa décision sur des preuves de l’implication soudanaise dans la guerre terroriste que lui livrait l’islamisme.

D’ailleurs, quand en 2005, le Conseil de sécurité votait la résolution 1595 qui déférait la situation au Darfour à la CPI, l’Algérie qui y siégeait ne s’y était pas opposée ; elle s’était abstenue.

Le coup de pouce au régime de Khartoum, même depuis débarrassé de Tourabi, autant que l’hommage posthume à Khomeïny, constitue une inconséquence politique.

La crédibilité de la diplomatie algérienne, ou ce qu’il en reste, doit-elle servir à faire attelage avec deux régimes hier impliqués dans une guerre qui nous a coûté deux cent mille vies, et qui nous sollicitent parce qu’aujourd’hui, ces mêmes agissements belliqueux les ont mis en difficulté avec la communauté internationale ?

S’il y a un hommage à rendre, c’est à nos victimes du terrorisme, à leurs victimes — parce que les États sponsors partageront pour la postérité les méfaits des groupes qu’ils ont construits, entraînés et motivés — qu’il faut le rendre.

Et la meilleure manière d’exprimer cette fidélité à la mémoire de nos morts, c’est que la République qu’ils ont défendue s’en souvienne quand elle vient à s’exprimer. Si elle est toujours là, la République est en train de se rendre coupable d’un déni de martyre envers ceux qu’elle a sacrifiés.

La course désespérée à la réconciliation avec les terroristes nous fait payer sans compter. Le principe de justice, l’argent du Trésor et la mémoire collective sont mis à mal dans une démarche qui, chaque jour, donne la preuve sanglante de sa vanité. Et comme la politique, dit-on, est le prolongement de la politique intérieure, nous voici “réconciliés” avec ces régimes qui, il y a quelques années, nous accablaient de leur meurtrière coopération.

Faut-il qu’en ce pays, en matière de terrorisme, le crime paie ?

Mustapha Hammouche

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