Un enfant, un arbre (1)
Je ne comprends vraiment pas pourquoi certains esprits chagrins ne font que critiquer nos ministres, leur reprochant leurs errements, leur bougeotte ou leur inamovibilité… Ils ont toujours quelque chose à redire! Certes, on peut critiquer l’action du gouvernement dans la danse qu’il exécute depuis quelques années: une sorte de tcha-tcha-tcha en ce qui concerne les privatisations des entreprises en difficulté ou leur subventionnement.
On peut, certes, déplorer que le salaire des députés flirte avec les 30 millions de centimes, quand on sait que trois millions d’enfants sont pauvres et ne peuvent effectuer une rentrée scolaire normale…Mais tout de même, après toutes ces critiques (il y en a bien d’autres, mais ce n’est pas le sujet de cette chronique, car si je me laissais aller, il y a de quoi écrire un volume aussi fourni que Les Misérables), il faut reconnaître que, souvent, le gouvernement (ou un de ses membres, ou un de ses conseillers, ou un brain-trust, ou alors carrément le pouvoir) a de bonnes idées, il faut le dire, il faut le faire savoir (c’est si rare!) et applaudir.
La bonne (et il faut reconnaître que c’en est une) vient du ministre de l’Education qui a décidé d’effectuer la rentrée scolaire avec le slogan et le projet: «Un arbre, un enfant». Il y a bien des similitudes entre le jeune plant qui est cajolé dans une pépinière ou sous serre, sans la surveillance d’agronomes expérimentés et attentionnés, et le jeune enfant vêtu d’un tablier tout neuf au début de l’année et qui va connaître la sollicitude quasi maternelle d’une institutrice sous-payée mais pleine d’espoir quant à l’avenir, car elle est consciente de la noblesse de sa mission, même si ce n’est qu’une contractuelle.
D’abord, il y a tant d’arbres divers quant à leur taille, leur origine, leur forme, leur fonction, leur utilité…J’allais dire une bêtise. Tous les arbres sont utiles puisque leurs racines corrosives dissolvent les sels pour les introduire dans le cycle merveilleux de la vie sous forme de feuilles, de fruits, de bois, d’écorce. Ils retiennent l’eau, consolident les reliefs, donnent de l’ombre et arrêtent (hélas!) souvent les voitures emballées.
Mais souvent, l’arbre, objet de mille soins en pépinière, se voit déménagé et transplanté à mille lieues de son lieu de naissance et il connaîtra soit les passages irréguliers des services de la voirie et des arroseuses municipales, soit les rigueurs d’un climat capricieux qui a tendance à se faire avare en eau et qui fait pleuvoir toujours là où c’est mouillé.
Et s’il a de la chance, (la chance est toujours un facteur déterminant même quand on est un arbre), il poussera dans l’enclos bien gardé d’un propriétaire porté sur l’écologie qui lui prodiguera les soins appropriés qui lui donneront bonne graine et haute futaie. S’il est un veinard, il ne connaîtra ni la cognée du bûcheron ni les ravages de la chenille processionnaire…S’il n’a pas de chance, par contre, il poussera sur le bord d’une route déserte, sur un talus desséché ou dans un bosquet qui a déjà, maintes fois, été la proie de pyromanes récidivistes.
Quoi qu’il en soit, il mènera une existence ordinaire, courte ou longue, soumis aux aléas de la vie comme tous les êtres qui vivent sur cette terre.
Selim M’SILI