Le désastre bureaucratique

Cohue, bousculades, cris, hurlements, évanouissements, tel est le scénario ordinaire et le plat du jour servi par tous les services d’état civil de toutes les mairies du pays. Si le spectacle est rebutant tout au long de l’année, il devient carrément effarant à la double rentrée, sociale et scolaire.

Le seul motif d’indulgence et de circonstances atténuantes qui puisse être invoqué par les responsables – et l’observateur le plus intransigeant peut leur concéder cette argutie – c’est qu’ils ne sont pas informés d’un drame administratif. Il est évident que ne pas être au courant de ce que vit le peuple n’est pas un motif de fierté ni un élément à mettre à l’actif des responsables et décideurs, locaux et centraux, élus ou commis de l’Etat.

A contrario, l’on est persuadé que si ces mêmes responsables, à moins d’être mus par une volonté manifeste de porter atteinte au crédit de l’Etat, faisaient un tour au moins une fois durant leur mandat ou leur durée de fonction, du côté des guichets, ils ne peuvent que réagir pour mettre fin à cette anarchie.

Les responsables, s’ils veulent comprendre en tout ou partie les raisons des émeutes d’une part et l’abandon du devoir civique lors des élections, sont en absolu devoir de s’enquérir de la situation de l’état civil dans notre pays, dans la capitale, les grandes villes comme dans les douars enclavés. Aucun mot n’est excessif ou exagéré pour qualifier ces scènes de files interminables où des hommes, femmes, vieillards, enfants, invalides ou pas, fatigués, exténués par l’attente et la chaleur, attendent leur tour depuis les aurores.

Des qualifiants comme catastrophe, désastre ou calamité sonnent comme de doux euphémismes et s’apparentent à un vernis vocabulaire pour décrire cette sinistre tragédie bureaucratique. Pourquoi ? Pour une fichue feuille de papier appelée pièce administrative, extrait d’acte de naissance, certificat de naissance, fiche familiale, document à légaliser ou autre motif de souffrance physique et de torture morale. Non, détrompez-vous, messieurs les décideurs, dans ce tableau noir, il n’y a pas une once de contre-vérité, qu’on n’a d’ailleurs absolument aucun intérêt à alimenter.

Il est étonnant d’assister à cette totale anarchie bureaucratique dans un pays qui recèle de brillantes éminences grises en matière de gestion administrative, à l’instar de Missoum Sbih, Smaïl Hamdani, Chérif Rahmani, Ould Kablia et Zerhouni, sans parler de tous les cadres sortis de l’ENA.

Pourtant, même un profane peut suggérer des solutions en relation directe avec les goulets d’étranglement visibles à l’œil nu. D’abord, il faudrait, et en urgence, alléger les dossiers administratifs, notamment les pièces qui reviennent périodiquement (et bêtement) comme l’acte de naissance d’origine pour la sécurité sociale à chaque fois qu’un travailleur change d’employeur.

C’est un exemple pris parmi des dizaines d’autres, sans compter les cercles vicieux de l’exigence d’un papier qui, pour sa délivrance, demande un troisième, lui-même exigeant la fourniture du premier. Secundo, il faut tout simplement multiplier autant que faire se peut le nombre des guichets et d’agents.

Mais on a beau chercher, voire inventer des solutions à l’hydre bureaucratique, ça reste une hydre, dont toutes les têtes ne seront éradiquées que par un seul moyen. C’est, purement et simplement, l’informatisation de tous les fichiers d’état civil qui, par la magie du clic, fera disparaître files, cohues et bousculades.

NADJIB STAMBOULI

Comments are closed.

intelligence artiste judiciaire personne algériens pays nationale intelligence algérie artistes benchicou renseignement algérie carrefour harga chroniques économique chronique judiciaire économie intelligence chronique alimentaire production art liberté justes histoire citernes sommeil crise alimentaire carrefour économie culture monde temps
 
Fermer
E-mail It