La palme de l’incivisme

L’Algérie encaissait mercredi dernier la dernière de ses «quatre vérités» : les Algériens ce sont des mal élevés ! Un autre constat effarant qui vient nous rendre à l’évidence et nous dire ce que le peuple algérien, cet ancien «héros», est devenu.

L’Algérie «souffre encore d’autres maux légués par la crise, dont l’incivisme et de multiples autres dévoiements qui perturbent l’harmonie sociale et retardent nos efforts de développement». La phrase n’émane pas d’un banal moralisateur de chez Soltani, d’un zélé militant de nos muettes zaouïas ou de l’un de ces enseignants qui ne font pas la grève, interdite dans la religion informelle : l’istislam. La phrase émane du chef de l’Etat lui-même. Bouteflika l’a dite à l’éducateur en chef du pays.

On ne sait pas s’il lui a confirmé ce qu’apprennent nos enfants à l’école en complément du programme scolaire officiel et comment qu’ils la quittent précocement mais tout à fait aguerris. Bons pour la rue, l’endroit où prennent forme les dérives les plus tordues, les plus maléfiques. L’essor du marché informel aidant, la rue n’était plus cette voie publique protégée par les agents de l’Etat sur le qui-vive et intraitables. La rue était à la merci du plus fort, de l’argent corrompu.

Elle était à conquérir et n’était contrôlable qu’en ce qui concerne la lutte antiterroriste. La rue devient un lieu malsain, obscène qui n’a absolument rien à voir avec nos us ou notre religion. La vulgarité domine la rue et beaucoup d’Algériens évitent autant que faire se peut de s’y aventurer en famille. Dans certains quartiers les familles ne peuvent ouvrir leurs fenêtres de peur d’être agressées chez elles par les grossièretés.

A l’inverse, d’autres familles usent de leurs fenêtres pour jeter dans la rue ce qu’ils ont de trop en plus des sacs-poubelles. Qui peut aujourd’hui prétendre au repos et à la tranquillité dans les quartiers populaires ? Et qui peut assurer ses droits au citoyen ? L’Etat s’absente ! Face aux anomalies et aux infractions on détourne le regard et, généralement, on s’abstient d’intervenir même lorsqu’on est expressément sollicités. De fait, les gens se trouvent acculés à régler leur problème par eux-mêmes ce qui, souvent, se termine par des drames comme le signale régulièrement la presse.

Dans l’Algérie d’aujourd’hui, les citoyens ne se sentent plus protégés alors que les voyous ne se sentent plus menacés. On retient son permis de conduire à un père de famille juste pour une veilleuse grillée alors qu’on détourne le regard quand les motos passent pleins gaz place des Martyrs pilotés par des gamins dans une noria qui met en danger les innombrables passants, à un jet de pierre du lycée Emir-Abdelkader. Et lorsqu’un citoyen se conduit en tant que tel et demande au coupable de se corriger, il s’entend réciter des blasphèmes inédits.

Car les Algériens sont devenus des artistes en blasphème, ils en inventent par chapelets et toujours retentissants. Aujourd’hui, en Algérie, l’incivisme est dénoncé à tous les niveaux sans que personne ne bouge le petit doigt pour corriger le tir. Persistera-t-on à vouloir incriminer les harraga qui ne portent du tort qu’à eux-mêmes et à lâcher la bride aux inciviques pour pouvoir empoisonner à loisir la vie du peuple ? Ne trouve-t-on pas scandaleux que le Président en arrive à tirer lui-même l’alarme ?

Mohamed Zaâf

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