Comme le voulait le Polisario ?
Christopher Ross, un diplomate américain qui n’est inconnu ni chez nous ni dans le monde arabe, serait pressenti pour remplacer Peter Van Walsum, personnage dont le contrat n’a pas été renouvelé en tant qu’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental. Si la nomination de M. Ross, annoncée par le sérieux quotidien madrilène El Pais, se confirme, le Polisario verrait enfin le vœu de son Président de voir les Nations unies charger un Américain du dossier du Sahara occidental exaucé.
La satisfaction sahraouie serait double étant donné que M. Ross maîtrise le dossier en tant que proche témoin puisqu’il exerçait déjà à Alger au moment de l’invasion du Sahara occidental et de la fuite éperdue de ses populations, pourchassées et bombardées par les FAR dans le désert. Il connaît tout cela sur le bout des doigts comme il sait aussi que les Sahraouis n’abdiqueront jamais leur droit à l’autodétermination et que les Algériens soutiendront ce droit tant qu’il y a un Sahraoui pour le faire valoir.
M. Ross n’aura sans doute pas la tâche facile quand on connaît les entourloupettes et autres reniements marocains, mais il héritera au moins d’une situation plus claire puisque débarrassée à jamais d’un «réalisme» contrefait qui la polluait. Le successeur de Walsum s’appuiera peut-être, lui, sur un autre réalisme.
Celui qui dit que le Polisario est reconnu comme le représentant unique et légitime du peuple sahraoui, que la République arabe sahraouie démocratique est membre fondateur de l’Union africaine, qu’elle a été reconnue par quelque 80 pays et que pas un seul Etat ne reconnaît la souveraineté du Maroc sur un seul pouce du territoire du Sahara occidental.
La réalité du terrain nous dit que le Polisario a, malgré l’opposition marocaine, été récemment admis en tant qu’observateur au sein de l’Internationale socialiste et que le Parlement européen s’intéresse de plus en plus à la question du Sahara occidental, théâtre d’incessantes atteintes aux droits humains. D’où la décision prise hier de dépêcher une commission ad hoc pour s’enquérir de la gravité de la situation dans les territoires occupés.
Quand M. Ross entamera sa mission, il le fera persuader que, contrairement à ce qui était ânonné, la proposition d’«autonomie» n’est ni «sérieuse» ni «crédible» et qu’au contraire elle se mettait en travers de la légalité internationale. De l’aveu de tous les acteurs, les quatre rounds de Manhasset n’ont rien changé au problème à part démontrer la vanité de la proposition marocaine et permettre à Mme Condoleezza Rice d’aller relancer, à partir de Rabat même, la «solution mutuellement acceptable».
Une déclaration qui venait comme une poignée de terre lancée sur la tombe de l’autonomie. Les propos de Mme Rice sur la question du Sahara occidental, son insistance sur l’amélioration des relations algéro-marocasines et, partant, intermaghrébines sont annonciateurs d’un changement au Maghreb où, la pression internationale aidant, la tendance semble incliner pour la paix.
Mohamed Zaâf