Variations plurielles

On ne sait pourquoi, mais l’on ne peut dire que l’histoire récente de l’Algérie est jalonnée d’un incessant défilé de responsables allemands, qui ne se sont décidément pas bousculés au portillon des accords avec notre pays. La visite de la chancelière allemande Angela Merkel est donc, de fait, à inscrire dans une logique de rupture avec ce passé, et les contrats conclus (sur le plan qualitatif et non quantitatif) témoignent de ce changement, pour lequel la formule «mutuellement bénéfique» n’est assurément pas une commodité de langage diplomatique, mais bel et bien une réalité concrète dans lesquels les deux pays trouvent leur compte.

D’ailleurs, on se demandera toujours pourquoi les relations avec l’Allemagne sont restées embryonnaires, et si l’argument de la langue était soulevé, il se dissout de lui-même, ne serait-ce qu’en comparaison avec nos relations avec la Russie… et sa langue, qui évidemment, n’est ni l’arabe ni le français. A tout point de vue, il est intéressant, voire nécessaire et indispensable d’élargir notre spectre d’échanges avec les pays développés, non seulement pour ne jamais être l’otage des pressions monopolistes, mais aussi parce que cette variation ne peut que sécréter des perspectives d’ouverture pour la société algérienne, sur le plan économique bien sûr, mais aussi sur le registre culturel.

Le fait que les Allemands aient décroché le contrat d’architecture du mégaprojet de la nouvelle mosquée d’Alger, est en soi révélateur des bénéfices que peut tirer une société, notamment son élite intellectuelle, de l’ouverture aux autres cultures, toutes les cultures, contrairement aux sociétés qui se figent au pire dans une pseudo- authenticité et à des racines vermoulues, au mieux dans l’assimilation de deux fuseaux culturels qui, même parfaitement maîtrisés et assimilés, n’en sont pas moins réducteurs à l’ère de la mondialisation.

Cette dynamique de variation avec les partenaires étrangers étant apparemment déjà sur les rails, il est à retenir un autre signe de rupture, l’inscription du privé algérien en tant qu’élément à part entière dans la conclusion des accords et sa participation aux discussions, à l’exemple de Cevital. Il est vrai que ce n’est pas la première fois que le privé algérien, depuis ces dernières années, est associé aux délégations, ministérielles ou même présidentielles, mais la rupture, parce que c’en est une, s’enregistre au niveau de la mentalité décisionnelle, autrement dit au niveau de la perception politique du secteur privé.

Ce secteur n’est plus relégué dans le rôle de strapontin d’appoint au secteur public, mais est réhabilité à sa juste place de maillon de la chaîne économique en général et du tissu industriel en particulier, et à ce titre, il a droit aux égards dus à un carburant, qu’on voit rarement mais sans lequel rien ne marche.

Petit à petit, on va se familiariser à la vue du nom d’une grande entreprise privée figurant en bonne place dans les accords internationaux et c’est là un élément des innombrables variations qui se déroulent sous nos yeux, changements qui s’ajoutant les uns aux autres, induisent de grands chamboulements dans ce pays. En douce, nous assistons à une révolution discrète et muette, parce que le temps que l’on assimile un fait d’actualité, il est déjà inscrit dans le registre historique.

Nadjib Stambouli

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