Calculs politiciens

L’Algérie s’apprête à célébrer, le 5 juillet prochain, la fête de l’indépendance et de la jeunesse. A cette occasion, les services techniques des APC s’affairent déjà depuis quelques jours pour pavoiser les rues et édifices publics aux couleurs de l’emblème national.

Sitôt l’événement passé, dans un rituel auquel les agents des mairies sont maintenant bien rompus, les drapeaux seront aussi prestement retirés pour être rangés au milieu des guirlandes et autres flonflons en attendant la prochaine fête nationale. Pour des raisons qui ne tiennent pas seulement à une question de pédagogie politique, la vue du drapeau national ne suscite pas ou plus les mêmes émotions que les premières années de l’indépendance.

La génération post-indépendance et celles qui sont venues après n’ont pas connu ou faiblement pour les Algériens et Algériennes nés après l’indépendance la poussée d’adrénaline que suscite avec une spontanéité difficile à réfréner la levée du drapeau national et l’exécution de l’hymne national. Pourquoi l’emblème et l’hymne national, qui sont une fierté chez d’autres nations qui se font fort, lors de festivités diverses, d’afficher leur amour et leur attachement pour ce morceau de tissu qui constitue un des attributs de la souveraineté des peuples laissent-ils indifférents les Algériens, plus particulièrement nos jeunes qui sont capables des pires paradoxes ?

Comme celui de soutenir l’équipe nationale de football avec une forêt d’emblèmes nationaux dans les tribunes tout en scandant, par ailleurs, des mots d’ordre peu glorieux à l’adresse des autorités pour crier leur malvie dans un pays qu’ils échangeraient volontiers pour une barque de fortune de harraga. Le directeur général de la radio, Azzedine Mihoubi, pense avoir trouvé la réponse pour faire de nouveau aimer le drapeau national aux Algériens en lançant pompeusement une opération de distribution, à titre gracieux, de l’emblème national dans les foyers.

Rivalisant « d’imagination », le secrétaire national de la Coordination nationale des enfants de chouhada lui a emboîté le pas en prenant l’initiative d’imprimer un million et demi d’exemplaires de l’hymne national Kassaman que les Algériens pourront trouver dans leurs boîtes aux lettres dans les prochains jours. Il fallait y penser ! L’amour de l’emblème national que beaucoup d’Algériens ont perdu après l’indépendance tient donc à si peu de chose.

Allons donc, soyons un peu sérieux ! Qui pourra croire un instant que l’entrée massive du drapeau national dans les foyers algériens va faire renaître spontanément la flamme patriotique et le sentiment national ? On voit déjà d’ici dans le sillage de cette initiative « citoyenne » de distribution de 5 millions de drapeaux, les harraga affrontant l’épreuve suicidaire de la traversée à bord de leur rafiot battant fièrement pavillon algérien !

Les nations où l’emblème national est exhibé fièrement partout et par tous, dans les actes de la vie de tous les jours comme dans les festivités officielles, n’ont pas eu besoin de recourir à ce genre d’opérations purement démagogiques, digne des régimes autoritaires, pour renforcer le sentiment national. L’attachement aux valeurs et aux symboles nationaux ne se décrète pas.

Il se nourrit de l’exercice plein et entier de la citoyenneté. Lorsque les Algériens, du nord au sud, d’est en ouest, par-delà de leurs conditions sociales, auront les mêmes chances d’accès aux bienfaits du développement : aux soins, à l’emploi, au logement…, alors à ce moment et à ce moment-là seulement, vibrer devant le drapeau et l’hymne nationaux deviendront des réactions spontanées, des actes citoyens qui nous éloignent des vils calculs politiciens.

Omar Berbiche

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