Changement de cap

La crainte des fonds souverains, des fonds gérés par les Etats, est tombée à Alger. Enfin ! Il y a des semaines seulement, personne, parmi les officiels algériens, ne voulait admettre l’idée de créer un fonds souverain, pour orienter une partie des réserves de change, de plus en plus importantes compte tenu de la bonne conjoncture pétrolière, vers des investissements publics à l’extérieur.

Le ministre des Finances, Karim Djoudi, avait justifié, en mai dernier, le refus de créer un fonds souverain par « les risques » de perte qui en sont liés. « Il faut voir l’opportunité de cette décision économique », a-t-il expliqué. Réticent au début, le ministre de l’Energie et des Mines se montre, lui, plus favorable à cette perspective. Il a déclaré hier à France 24 que l’Algérie peut créer un fonds souverain dans les quatre à cinq années à venir.

Même si cette période paraît trop longue, par rapport à l’évolution rapide des cours mondiaux d’énergie, l’option est perçue comme « valable » par Chakib Khelil. Cela souligne un changement de cap de l’orientation économique et stratégique du pays. Un changement positif. Est-ce à dire qu’il y a moins de brouillard à l’horizon ? Jusque-là, on ne savait réellement pas quoi faire de l’argent du fonds de régulation des recettes (FRR) qui prend en charge le différentiel entre le prix réel du baril de pétrole et le prix, 37 dollars, fixé pour élaborer la loi de finances, et qui existe depuis huit ans.

Même si les officiels ont tendance à dire beaucoup de choses — sans convaincre —, une grande partie de ce fonds n’a pas de destination claire avec échéances et objectifs. Aujourd’hui, samedi 28 juin 2008, le montant exact de ce fonds, qui évolue chaque jour, n’est pas encore connu du public. L’information sur les réserves de changes est, elle aussi, partielle. Il y a d’abord nécessité urgente d’instaurer la confiance en érigeant la transparence sur la gestion de l’argent du pétrole et du gaz comme règle permanente.

Ensuite, il s’agit de sortir d’un état de prudence excessive dans cette gestion qui fait que l’équivalent de trois fois la loi de finances est en dehors du circuit, argent immobilisé dans le FRR, alors que les cours du brut n’ont pas cessé d’augmenter (140 dollars le baril hier soir). Il faut bien réfléchir dès maintenant à fructifier les réserves de changes qui vont, à la fin 2008, atteindre les 200 milliards de dollars.

Limiter les risques, qui est la doctrine de la Banque d’Algérie qui gère ces réserves, est de réaffecter une partie de cet argent, avec celui du FRR, vers un fonds souverain et engager des investissements ou des prises de participation là où il le faut. Cela ne doit pas se faire dans cinq ans, mais demain ! Au lieu de laisser ces réserves fondre par petite goutte, à cause de la faiblesse du dollar face à l’euro, autant les investir avec intelligence et pertinence.

L’Algérie a tous les moyens, y compris humains, d’engager la réflexion, qui doit prendre une allure de priorité nationale, sur la création d’un fonds souverain. Des efforts doivent être engagés pour y mettre toute la logistique nécessaire. Appel doit être fait pour toutes le compétences pour étudier la manière de prendre durablement place dans le marché financier international. L’Algérie ne peut plus rester à l’écart du mouvement mondial.

Des pays comme la Libye, les Emirats arabes unis, le Koweït, la Norvège, le Canada, Singapour, l’Iran, la Malaisie, le Qatar ont créé des fonds souverains et investissent partout dans le monde, suscitant de grandes inquiétudes en Occident. Le montant global de ces fonds avoisine les 3355 milliards de dollars. Avoir un fonds souverain, c’est une manière redoutable d’avoir une voix entendue dans le monde et une présence visible.

Faycal Metaoui

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