À peu près, un mode de gouvernance

Le dernier montant du programme de soutien à la relance économique, énoncé par Belkhadem, était de 140 milliards de dollars. Aussitôt ce Chef du gouvernement remplacé, la cagnotte a grimpé à 190 milliards. C’est le (même) ministre des Finances qui a émis le nouveau chiffre.

Pour un budget, tout le monde aura remarqué son élasticité qui fait que son total semble dépendre du moment et de la source.

Comme pour répondre à ce discours de l’à-peu-près, le ministre de l’Économie a annoncé que son pays compte investir 50 milliards de dollars en Algérie, entre… 2006 et 2009. Quand on apprend que 2006 et 2007 sont passés, sans que les investissements émiratis dépassent les 7 milliards, on devrait croire que le rythme d’investissement des hommes d’affaires des Émirats sera multiplié par six, “à peu près”, pour l’an et demi à venir !

Il y a déjà la promesse d’environ 28 milliards de Eemar, projetée, depuis longtemps, en chandelle, au-dessus de nos têtes. On attend toujours qu’elle retombe. Eemar attend, peut-être, de son côté, qu’on lui cède le secteur de l’Agha dans la capitale, de la baie d’Alger et de Sidi-Abdallah pour qu’il y réalise sa fameuse maquette.

En janvier dernier, au troisième Forum des investisseurs arabes, Belkhadem annonçait qu’en sept ans, entre 2001 et 2007, l’ensemble de l’investissement arabe en Algérie se montait à 7 milliards de dollars ! Pour l’heure, nos frères d’Orient se contentent de clôturer leurs acquisitions foncières, bien réparties dans ce qui subsiste de terrains vierges le long de la côte, et de voir venir.

Comme ne compte que l’instant présent et que la responsabilité s’évanouit avec le temps qui passe, nos responsables multiplient les certitudes qu’ils contredisent ensuite. La danse des nombres s’observe, perpétuelle, en tous domaines : finances, sécurité, emploi, prix…

Même nos partenaires se mettent à faire les illusionnistes avec cette arithmétique financière qui nous passionne. Et la presse nationale s’extasie invariablement devant l’intérêt de nos bienfaiteurs industriels qui misent avec un enthousiasme débordant sur notre développement. On se souvient des huit milliards de dollars allemands destinés au secteur des hydrocarbures que nos journaux ont annoncés parce qu’un officiel germanique avait fait observer que ce secteur était demandeur de huit milliards d’investissement étranger !

Il n’y a pas que les quantités d’argent qui sont traitées avec une certaine désinvolture. Le temps aussi prend son temps. Si bien que la notion de délai n’est même plus significative. Avant-hier, dans un entretien à notre confrère Le Soir d’Algérie, le directeur du projet du tramway d’Alger, qui visiblement est sur la voie de son prédécesseur, le projet de métro, répondait ainsi à propos du retard annoncé de son chantier : “Nous avons un retard approximatif de trois mois.”

Dans cette formule, réside une conception du facteur temps. Chez les hauts responsables, on se permet d’être précis, parce qu’on n’est pas comptable de ses contradictions ; chez les cadres, l’imprécision vient au secours du déficit de rigueur de gestion. Un retard pourtant trop important pour n’être évalué qu’approximativement.

C’est “à peu près” ainsi que va le pays, approximativement et à l’emporte-pièce.

Mustapha Hammouche

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