Priorités

L’argent a une influence considérable sur le caractère des gens. Il n’y a peut-être que les poètes ou les philosophes pour dédaigner l’étalon de la fortune. Quand l’argent vient à manquer, on se lamente, on se sent au ras des pâquerettes; on a le moral au niveau des semelles, bref, on a envie de raser les murs. Quand on en a, le regard s’allume, on bombe le torse, on redresse la tête et on navigue dans la stratosphère.

Alors quand l’argent est en quantité astronomique, il fait tourner la tête, les têtes et permet les rêves les plus fous. Pourtant le sage doit garder la tête froide et les pieds sur terre: à l’exemple du prophète Joseph (Qlssl), il doit arriver à la conclusion qu’il faut prévoir les mauvais jours et utiliser rationnellement ce que la Divine Providence a déversé en grande quantité dans l’escarcelle. Le fils prodigue par contre ne pensera qu’à jeter aux pigeons des boulevards ou dans les lieux de débauche sa fortune éphémère…

Depuis que le baril navigue autour des 140 dollars et que les réserves de changes estimées déjà à plus de 120 milliards promettent de s’épaissir à une taille qui mettrait pour quelque temps les Algériens à l’abri des soucis budgétaires (ou du moins ceux qui ont accès à la rente…), il est donc fréquent, durant cette embellie financière, d’entendre sur les ondes ou de lire dans la presse les propositions nouvelles quant à l’usage de cette manne céleste par ceux qui ont ou ont eu la charge des affaires publiques.

D’abord, il est à noter que ces braves gens, qui «ont manqué d’intelligence» au moment où l’Algérie pédalait dans la gadoue et que Camdessus venait donner ses recettes de cuisine, n’ont pas eu la moindre étincelle pour faire sortir le pays du marasme tridimensionnel où il était enlisé.

D’abord ceux qui ont failli brader nos ressources en hydrocarbures et poussé à une privatisation forcée des entreprises nationales ont évoqué la nécessité de créer de nouvelles entreprises étatiques: faut-il rappeler que les dernières qui ont échappé à l’équarrissage peinent et slaloment entre mise à niveau et liquidation? Faut-il rappeler que Tiaret attend depuis un tiers de siècle au moins son usine de montage de véhicules?

Ensuite, les plus audacieux parlent de créer des fonds souverains, histoire de s’asseoir à la table des grands sans avoir démontré auparavant une quelconque efficacité économique. Tous les pronostics sont permis et, avec, le doute.

Au lieu de chercher à tirer des plans sur la comète, n’est-il pas plus sage d’investir dans la production agricole: la dépendance alimentaire est le danger le plus grave qui menace un pays dont le régime est plus préoccupé par les dépenses de prestige et l’importation de biens de consommation.

Outre le soutien des prix à la production et à la consommation, des solutions devraient être prises pour rendre le pays plus attractif: protection de sites naturels et protection des forêts et des terres agricoles.

Au moment où l’administration vient de boucler un recensement, il est opportun de proposer des mesures adéquates, acheter un zodiac pour tout candidat à l’émigration clandestine, payer à chaque foyer une carte pour Canal+, TPS et Arte, histoire de respecter la diversité des goûts.

Il serait souhaitable de crypter l’Unique, de fournir un ordinateur et l’accès gratuit à l’Internet aux citoyens qui n’ont jamais occupé un poste de responsabilité dans l’administration. Evidemment, ces derniers souhaits ne seront pas exaucés, autrement, l’Algérie deviendrait un grand Club des Pins.

Selim M’SILI

Leave a Reply

You must be logged in to post a comment.

intelligence artiste judiciaire personne algériens pays nationale intelligence algérie artistes benchicou renseignement algérie carrefour harga chroniques économique chronique judiciaire économie intelligence chronique alimentaire production art liberté justes histoire citernes sommeil crise alimentaire carrefour économie culture monde temps
 
Fermer
E-mail It