L’ÉNORME ÉNORMITÉ DE MONSIEUR ÉNORMITÉS !
A l’issue de son concert à Alger, Hélène Ségara a déclaré : «Je reviendrai ! »
C’est bien ce que je craignais…
Selon le ministre de l’Intérieur, plusieurs des personnes arrêtées suite aux troubles et affrontements de Berriane seraient issues de «milieux aisés». Je ne sais pas ce qui est attendu de ce genre de «révélations».
Me balancer à la figure cette «information», ça ne suscite en moi qu’une seule et furieuse envie. Celle de rétorquer : «Et alors ? » Faut-il, sous prétexte que l’on ne manque de rien, que l’on soit né avec une cuillère en argent dans la bouche, que l’on ne s’inquiète pas le matin de ce que l’on mangera le soir, fermer sa gueule devant l’injustice et la hogra ?
Le penser, le croire, c’est réécrire à sa façon l’histoire même de l’humanité. Emettre cette énormité qui consiste à dire «les riches ne peuvent pas se rebeller», c’est interdire à Lénine de braver l’ordre impérial russe. C’est dénier à Marx le droit de rédiger le Capital. C’est stopper net l’épopée de l’émir Abdelkader. C’est… ridicule et énorme à la fois.
Mais, au-delà de l’énormité énorme de Monsieur Enormités, il y a des glissements dangereux, des similitudes inquiétantes avec des «raisonnements » qui résonnent encore dans mes oreilles et dans celles de toutes celles et tous ceux qui ont oublié d’être amnésiques.
Souvenons-nous de ce ministre de la République qui s’étonnait à voix haute et poilue que le «terrorisme tue les policiers, alors que ces derniers ne sont ni communistes ni athées». Voilà les raccourcis mortels. Les chemins de traverse coupe-gorges. Les ellipses assassines.
Les contractions mortifères. Lorsque la main de l’étranger est de repos, lorsque le complot ourdi est en congé spécial, lorsque les visées déstabilisatrices sont en goguette, le régime n’est pas complètement désarmé.
De sous sa cape, il nous sort un engin… désarmant : parmi les émeutiers arrêtés, se cachaient des riches, des rupins, des friqués, des «qui n’ont rien à voir avec la misère». Et de tout cela, bien sûr, la conclusion que le régime voudrait nous voir tirer se résume à ceci : «Si l’on a arrêté des milliardaires dans le lot des grognards, c’est qu’il y a forcément manipulation. »
Saluons donc l’entrée en fanfare de la Main du Milliardaire dans la déjà bien fournie armurerie du système. Et fumons du thé pour rester éveillés à ce cauchemar qui continue.
Hakim Laâlam
