«Iconolâtrie»

La philatélie est une activité bien particulière: elle commence par simple curiosité, puis enfle jusqu’à devenir une passion dévorante. Je vous en parle car je la connais bien. Tout a commencé quand, en 1962, je reçus une petite boîte métallique pleine de timbres oblitérés et représentant Marianne, symbole de la République française. Il y avait aussi Cérès, la semeuse, et beaucoup de personnages que je ne connaissais point encore. Puis, un jour, dans un ouvrage de bandes dessinées, je découvris une publicité d’une société qui vendait des timbres par correspondance.

Pour cinq dinars de 1963, je reçus cinq cents timbres divers qui ne devaient avoir alors aucune valeur philatélique. Mais, c’était une riche collection d’images. C’étaient des reproductions de la guerre civile chinoise, des séries de magnifiques lépidoptères, des héros, des savants, des oiseaux exotiques, des blasons de villes aux noms lointains…

Je me suis soudain aperçu que mes connaissances en histoire, en géographie et en sciences augmentaient en même temps que gonflait ma collection de timbres. C’est simple: un nom inconnu me poussait illico à consulter le Larousse ou le Quid.

Et de fil en aiguille, un nom en appelant un autre, une date faisant ressortir des événements qui faisaient référence à d’autres noms, je me trouvais embarqué dans une recherche en spirale qui n’avait ni début ni fin. C’est ainsi que j’ai approfondi mes connaissances dans l’Histoire de France, j’ai pu apprendre à déchiffrer les caractères cyrilliques, contempler les merveilles du monde, posséder les reproductions des tableaux de grands maîtres, me familiariser avec les monnaies étrangères, mesurer les effets de l’inflation grâce au prix des timbres, juger le régime d’un pays au travers de ses multiples éditions philatéliques.

J’ai pu, ainsi, connaître les têtes des dictateurs africains, passés et présents. J’ai pu mesurer le culte de la personnalité en vigueur dans certains régimes, apprécié les diverses campagnes de guerre ou de paix. J’ai appris beaucoup grâce aux timbres. J’espère, toutefois, que mes petits-enfants connaîtront l’histoire de leur pays grâce aux timbres.

Selim M’SILI

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