La harga dans l’autre sens

Les Algériens éprouvent aujourd’hui un malaise lorsque, dans leurs discussions, est évoqué la triste question des harraga. Un phénomène qui enfle et qui laisse tout le monde désarmé à l’instar de la mendicité, l’autre fléau qui donne mauvaise conscience aux nations.

Mis à part les bons génies qui leur réservent la prison comme récompense, personne ne sait vraiment quoi faire pour terrasser le virus de la harga. Nos jeunes tentent l’aventure dans l’espoir de tronquer leur mal-vivre contre des espaces maquillés de rose par d’éloquentes paraboles occidentales. Dans leur pays, nos jeunes se retrouvent sans boussole, sans repères, sans objectifs et ne s’y voient donc pas d’avenir. Il y a un demi-siècle, d’autres Algériens tout aussi jeunes avaient choisi de faire le chemin inverse. Installés en France, là où s’aventurent aujourd’hui une partie de nos harraga, ils paraissaient pourtant comblés. Ils avaient l’argent et le confort, ils avaient la notoriété et la gloire.

Sauf qu’hier, nos jeunes choisissaient de quitter l’Occident, son luxe, le vedettariat. Ils choisissaient de faire une harga en sens inverse avec les énormes risques que cela induisait à un moment où la guerre de libération se trouvait au milieu du gué. Qui ne se rappelle pas de l’épopée de ces harraga que le peuple algérien combattant adopta rapidement parmi ses meilleurs représentants à l’étranger ?

Les jeunes répondraient-ils aujourd’hui à un appel du FLN comme l’avaient fait hier leurs aînés qui constituèrent la glorieuse équipe de football du Front ? Si le sigle est merveilleusement conservé, les mentalités, hélas, diffèrent et le FLN ne peut récolter à chaque saison que les fruits de son labeur. Hier, on sacrifiait les intérêts pour le pays, les Algériens suivaient l’exemple, aujourd’hui, on sacrifie le pays pour les intérêts.

Une différence qui, faut-il admettre, est décisive dans la détermination du sens géographique de la harga. Une différence qui nous confirme la supériorité morale d’une école qui reste le phare. Car les meilleures réalisations postindépendance ont pour auteurs les gens formés à cette école. L’ossature de l’équipe de Gijon n’est-elle pas un pur produit des anciens du FLN ? Ses membres ne proviennent-ils pas de l’équipe junior formée par Kermali, cette même équipe qui trébucha face à l’équipe argentine et de sa vedette précoce Maradona ? N’était-ce pas Rachid Mekhloufi qui éleva à des niveaux inattendus l’équipe militaire et qui décrocha à l’équipe fanion les titres méditerranéen et africain ?

Les bonnes performances de l’ancien FLN ne s’arrêtent pas au football mais touchent aux autres domaines, qu’il s’agisse d’économie, d’éducation ou même de démocratie ou de justice sociale. Et moins d’économie, moins d’éducation, moins de justice sociale, cela veut dire moins de valeurs de l’ancien FLN, et cela ne peut donner que plus de harraga. L’axe du mal ?

C’est celui qui, volontairement ou non, décourage la matière grise algérienne d’opérer la harga en sens inverse et le retour au pays. Le retour parmi nous de nos harrags diplômés nous sera certainement plus bénéfique qu’une cohabitation avec le FBI ou la légion évangélique.

Mohamed Zaâf

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