La mise au pas

Quelle est la plus fidèle photocopie du système politique algérien ? C’est assurément l’UGTA. Rien ne peut lui être refusé par les pouvoirs publics, pleins de reconnaissance pour le rôle qu’elle joue dans le verrouillage du monde du travail, y compris de baigner dans l’illégalité : l’organisation a été autorisée à fonctionner sans aucun problème depuis fin 2005, alors que le mandat de son conseil national a expiré depuis cette date.

Idem pour ses fédérations et ses unions de wilaya, celle d’Alger n’ayant pas été renouvelée depuis une… douzaine d’années. L’article 169 du statut de l’UGTA a été proprement bafoué, l’Etat allant loin en impliquant la centrale syndicale dans les fameuses « tripartites », lui faisant signer un document des plus officiels : le pacte social. Jamais les pouvoirs publics ne se sont intéressés aux caisses de l’union, alors qu’elle brasse un argent fou : elle est présente dans les œuvres sociales de multiples sociétés et organismes publics et dispose à sa guise d’un patrimoine immobilier important.

Elle a vendu sans aucune transparence les beaux locaux du journal Révolution Africaine à… Khalifa Moumen. Les graves conflits qui agitent périodiquement l’organisation sont quelquefois liés à des questions organiques ou syndicales, mais tous ont trait à la répartition de la rente. Les remises en cause de Sidi Saïd et de son entourage de fidèles ont été réglées d’une manière expéditive, la toute dernière ayant trait au syndicat des douanes.

Le pouvoir politique a fait mieux : il n’a pas réagi lorsque la justice a embastillé deux cadres de la Cnas, pourtant le président du conseil d’administration de la caisse, en l’occurrence Sidi Saïd, avait reconnu devant le tribunal de Blida avoir donné son feu vert à la mise en œuvre de la résolution autorisant d’importants dépôts à El Khalifa Bank. Car il faut dire que la centrale syndicale est incontournable dans le service rendu au pouvoir politique : elle tue dans l’œuf toute contestation syndicale déplaisante et n’hésite pas à mobiliser ses troupes pour participer aux célébrations officielles.

Elle est restée sans broncher devant la répression des syndicats autonomes lesquels n’ont évidemment pas été invités aux travaux du 11e congrès. Les questions démocratiques évacuées, Sidi Saïd réélu pour un autre mandat à l’hôtel El Aurassi, c’est l’assurance pour le pouvoir politique d’avoir à ses côtés la même UGTA qu’avant, celle qui fut la première à répercuter le mot d’ordre lancé par Belkhadem, fin 2007, d’un troisième mandat pour Bouteflika.

Le système politique est en train de battre le rappel de ses troupes pour que, le moment opportun, celui de l’annonce officielle de la candidature de Bouteflika, il n’y ait pas d’eau dans le gaz. De grandes organisations ont subi le même sort que l’UGTA et celles qui posent encore problème se verront subir une « normalisation interne », avec les procédés « efelenistes » bien huilés depuis près de cinquante années. Il faut s’attendre à ce que cette mise au pas s’étende à d’autres secteurs.

S’agissant de la justice, le bâtonnier d’Alger, Me Selini Abdelmadjid, vient de recenser les mécanismes du musellement par sa tutelle. Ils donnent froid dans le dos : le magistrat algérien est réduit à un simple exécutant des ordres venus d’en haut et les cours de justice ne méritent même pas d’exister.

Ali Bahmane

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