DU BLOC OPÉRATOIRE AU TRIBUNAL

A la radio nationale, Sid Ali Boukrami, un économiste de renom parle de la fuite des cerveaux. Le jour même, des professeurs et docents reçoivent des décisions de justice annulant la grève. Boukrami explique que la matière grise est une denrée de plus en plus rare au regard des besoins grandissants. Le gouvernement parle avec nos chercheurs et profs à coups d’arrêts de tribunaux. Boukrami explique que la concurrence sera rude pour attirer chez soi les savants.

Belkhadem et Amar Tou lèvent la trique pour faire rentrer dans les rangs des hommes qui tentent tous les jours de sauver des vies et former les futurs médecins. La comparaison devrait suffire pour appeler Boukrami à réévaluer la notion de fuite quand il parle de la situation des cerveaux algériens. Ne s’agit-il pas plutôt d’une politique délibérée d’expulsion ? Le gouvernement leur demande de partir avec toutes les formes de langage dont il dispose : salaires de misère, déconsidération, répression continue et menaces à peine voilées. Comment interpréter autrement la condition misérable faite à nos scientifiques ? Il n’y a pas d’autre explication ! «Celui qui n’est pas content n’a qu’à partir !».

C’est hallucinant ! Le pouvoir est tellement sûr de sa force qu’il décide de gérer le pays sans les élites et, au besoin, contre les élites. Ce simple fait indique tout l’écart entre un pouvoir et un Etat. Les sociétés qui en sont capables créent des Etats comme espaces du droit pour gérer les conflits qui les traversent. Un Etat aussi rudimentaire soit-il repose sur un consensus qui exclut le recours à la force ou à des positions dominantes pour trancher les questions qui fâchent.

Mais un Etat repose aussi sur la nécessité de l’impôt pour faire vivre ses services et ses démembrements. Quand un pouvoir peut financer ses moyens de répression, il crée une administration, pas un Etat. «La loi, c’est moi.» C’est ce que vient de dire Belkhadem. Il balaye tout ce qu’il a dit auparavant sur la grille des salaires. Il fallait attendre la finalisation des statuts particuliers ? Pas de problème, son décret exécutif lève l’obstacle juridique. Si une règle le contraint, Belkhadem l’annule.

La déconnexion entre pouvoir et société est totale. Alors, inviter Sid Ali Boukrami et tous les autres chercheurs algériens qui persistent à défendre la raison, la rationalité et l’attachement au pays, à utiliser un autre concept que celui d’exode ou de fuite de cerveaux me semble nécessaire pour mieux rendre de la réalité. Mais l’invitation au départ concerne-t-elle seulement les diplômés ?

Mohamed Bouhamidi

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