Ziari, l’APN et la démocratie

Le bilan de clôture de la session d’automne présenté par le président de l’Assemblée nationale fut élogieux. Selon Ziari, l’APN a activement participé, ces derniers mois, à la mise en œuvre du programme du Président, notamment en ce qui concerne la réforme de la justice et des systèmes éducatif et financier.

Difficile pourtant de voir ce qui a changé, “ces derniers mois”, dans la justice, dans le système financier ou dans l’école.
Mieux, l’APN, occupée à opérer ces grandes transformations, n’a pas entendu les inquiétudes des lycéens et la détresse de leurs professeurs, ni vu les grèves qui ont paralysé des universités. Pourtant, par nature, l’APN a partout des oreilles et des yeux de députés !

Trop prise par la réforme du système financier, elle n’a pas constaté que le pays a un problème prosaïque de billets de banque.
Trop affairée par les réformes, l’APN n’a peut-être par remarqué que la réforme — en voilà une autre ! — de la grille des salaires a été bien plus généreuse avec les hauts cadres qu’avec les smicards, que des pénuries, de lait notamment, ont éprouvé les plus démunis et qu’une inflation des prix à deux chiffres a achevé de les pressurer. Trop prise par les réformes, l’Assemblée n’a pas vu que le terrorisme menace — physiquement — les institutions dans la capitale. Quand le bruit des explosions s’est rapproché, elle prit des mesures pour mieux sécuriser la fréquentation de l’hémicycle et son parking, puis s’est penchée à nouveau sur les urgentes réformes.

Même “les questions orales”, faites pour confondre le gouvernement pour sa mauvaise gestion, évitent les questions… qui fâchent.
On peut reprocher à la représentation nationale sa déconnexion d’avec les problèmes de la nation qu’elle représente. Mais sans oublier que le Conseil des ministres, qui l’a habituée au monopole de la proposition de loi, est suspendu depuis des mois et ne l’approvisionne donc plus en projets. Cela ajouté à la stérilité des élus en matière d’initiative de loi, on comprendrait la panne parlementaire.

Disons qu’à 65% d’abstention aux législatives, nous avons, en quelque sorte, eu pour notre argent d’efforts parlementaires.
Mais le président de l’APN s’est rattrapé de la panne législative : si son homologue du Sénat a réussi sa rentrée en y annonçant son soutien à la révision de la Constitution en vue d’un troisième mandat, Ziari a réussi sa sortie en y faisant de même. Selon le président de l’APN, la Constitution doit “consacrer la volonté du peuple dans le choix de ses représentants sans limitation de mandats électoraux”.

Suggérant que son institution est prête à assumer le coup de force et à nous faire l’économie d’un référendum, Ziari précise qu’elle constitue “l’espace approprié” pour réaliser l’initiative de révision constitutionnelle. Cela avec “ijtihad” en matière d’histoire des idées politiques. “La limitation (des mandats) a été imposée de l’extérieur à certains pays africains, durant les années 1990, sous prétexte d’alternance au pouvoir”, a-t-il soutenu, contribuant par cet apport nouveau à l’argumentation du troisième mandat.
Étrange et paradoxal système où l’Assemblée, elle aussi suggérée de l’extérieur, “sous prétexte de démocratie”, peut servir à dénoncer l’idée d’alternance au pouvoir.

Mustapha Hammouche

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