LEURS BILANS, NOS PHOTOS !
Alger. Intempéries. Malgré la violence de la pluie, malgré les chutes de grêlons et malgré les vents, elle a tenu bon.
La ligne bleue !
A quelques heures d’un jeudi qui s’annonce aussi pluvieux et froid que ce mercredi, un temps à ne pas mettre un chien dehors, je vous invite, dans la mesure du possible, à vous procurer deux journaux d’hier mardi. El Khabar et El Watan. Dans ces deux quotidiens, deux photos. Celle d’ El Khabar est en Une. Impossible de la rater.
Celle d’ El Watan, vous ferez le petit effort d’aller la chercher en page 6. Elle représente un papa en train de sauver des flots montants son enfant. La seconde a été prise dans une école du sud du pays. Des enfants assis par terre dans une salle de classe dépourvue de chaises et de tables, photo accompagnée d’une légende qui nous explique que beaucoup d’écoles de cette zone du pays n’offrent même plus de sièges et de tables aux enfants scolarisés.
Vous pouvez consulter ces photos dans cet ordre, dans un autre ordre, celle d’ El Khabar en premier ou l’inverse. Il n’y a pas d’ordre dans le désespoir. Mais, et si vous avez enfin pu mettre la main sur ces documents, regardez de plus près les yeux du père qui porte son enfant à bout de bras pour qu’il ne soit pas englouti par les eaux déchaînées. Fixez son expression. Il y a tout dedans.
La peur pour son enfant. Sûrement la peur pour lui aussi. La douleur. La fatigue de l’effort quasi-surhumain qu’il est obligé d’accomplir. La lassitude. L’écœurement. Sur la photo d’ El Khabar, on ne voit pas les yeux des élèves. Le photographe a pris un angle arrière.
Mais l’on voit distinctement les chérubins, les fesses sur le carrelage froid se serrant les uns contre les autres, comme pour mieux tromper le froid. Bien sûr, on peut parler longuement d’une photo. Encore plus longuement de deux photos. On peut écrire beaucoup de choses sur ce qu’elles peuvent révéler. Mais, les photos sont faites pour être vues.
Elles parlent d’elles-mêmes selon la formule consacrée. Celles-là plus particulièrement. Moi, je vous avoue que depuis que je les ai vues, je sais encore un peu plus, encore un peu mieux pourquoi, demain jeudi, je resterai chez moi. Pour fumer du thé et rester éveillé à ce cauchemar qui continue.
Hakim Laâlam