Les réformes «quatre saisons»

Dans la maison de la Justice d’Algérie, personne n’est apparemment content de son sort, ni les magistrats, ni les avocats et encore moins les justiciables, si l’on se réfère aux échos répercutés par la presse. Aux dernières nouvelles, une cinquantaine de magistrats penseraient à remettre leur démission en raison d’un climat qui, selon eux, ne prête pas à l’exercice de la profession. Ces juges à la conscience miraculeusement encore vive ne pouvaient s’accommoder des «pressions extérieures à l’appareil judiciaire» et des empiètements sur leurs prérogatives.

Pour sa part, M. Eugene Brott, un ancien juge américain, en visite en Algérie, s’interrogeait plutôt si les magistrats algériens «bénéficiaient de privilèges émanant de parties extérieures concernées par des affaires de justice». En plus clair, l’hôte américain demandait si nos juges étaient sensibles à la corruption. Bref ! Cinquante de nos magistrats nous ont dit, de manière implicite mais amère, que «la séparation des pouvoirs» dont on parle tant dans les discours et dans nos textes s’avère être un objectif autant rêvé et autant réalisable que la problématique UMA.

Ce qui laisse penser qu’une distance appréciable nous sépare encore de l’Etat de droit tant réclamé en Algérie, probablement le seul pays au monde où les justiciables réagissent systématiquement aux verdicts par la cassation. Même si l’on ne peut nier un certain mieux dans le domaine de la justice, les réformes introduites par le Président n’ont pas donné les résultats escomptés, ce qui peut-être explique l’absence, lors des deux dernières années, du premier magistrat aux manifestations annuelles du Haut Conseil à la magistrature.

Peut-on prétendre à un Etat fort sans une justice aux qualités reconnues de tous ? Une justice qui met tout le monde à égalité devant la loi, y compris les étrangers ? Les Algériens sont des assoiffés de justice et sont foncièrement contre la hogra, ce qui explique en grande partie les émeutes et l’accélération de leur rythme à travers l’espace national. Les Algériens paraissent de plus en plus allergiques aux injustices, particulièrement les jeunes qui ne sont pas très regardants au coût de la casse et qui donnent ainsi l’impression d’être en décalage par rapport à la jeunesse d’un monde arabe qu’on ne peut malheureusement présenter comme un modèle de justice.

«La réforme de la justice constitue un impératif et un tremplin vers toute réforme réelle de la société dans le monde arabe», soulignaient d’ailleurs les participants à un colloque international tenu récemment à Rabat. Une réunion qui a prévu la mise en place prochainement d’une instance arabe pour le soutien de l’indépendance et la réforme de la justice. L’avocat ? Il risque de gagner en vulnérabilité autant que l’imam et le journaliste !

Mohamed Zaâf

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