Les portes de la repentance
Elles sont larges, carrées et rugueuses, faites d’un bois grossier, un bois tendre de jeune forêt avec lequel on peut faire des langues ou des pipes. Il n’y a pas d’adresse dessus ni de sonnette et il n’y a pas de videur devant. Les portes de la repentance sont toujours ouvertes, a expliqué le président à l’occasion de son discours du 5 Juillet.
Quiconque veut les passer peut les passer. Les portes de la repentance s’ouvrent avec une serrure particulière dont la combinaison est détenue en haut lieu et dont la clé ne sert qu’une fois parce quand elles sont ouvertes, les portes de la repentance le restent.
On peut passer ces portes pour entrer, saluer l’employé de service, trouver que ce n’est pas assez bien et ressortir. On peut emprunter encore ces portes pour y entrer plusieurs fois et ressortir autant de fois puisqu’elles sont toujours ouvertes.
Les portes de la repentance sont comme les portes des mairies les heures ouvrables. En théorie, les portes de la repentance délimitent deux espaces. Ceux qui sont dehors, hésitent à passer ou refusent de s’abaisser à les passer.
Et ceux qui sont dedans, se plaignent des courants d’air ou, au contraire, insistent pour laisser les portes ouvertes afin de respirer. En théorie, c’est aux portes de la repentance que l’on dépose les armes, mais en pratique, beaucoup entrent avec.
En théorie, il y a un scanner aux portes de la repentance, destiné surtout à empêcher ceux qui ont des bombes ou ont commis des crimes de sang de les passer. En pratique, le scanner n’a jamais fonctionné, par manque de pièces détachées et au fond, personne n’a envie de le faire marcher parce que c’est une machine trop compliquée.
La vraie question est du niveau de la 3e année fondamentale : à quoi peut bien servir une porte qui est toujours ouverte ? Si elle n’est jamais fermée, autant la retirer puisque tout le monde peut la passer.
Amari Chawki
