Aveux à contrecœur
Le pouvoir a dû reconnaître la très faible participation aux élections. Il lui a fallu plus de deux heures pour annoncer le taux de participation et toute la nuit de jeudi à vendredi, dix heures du matin, pour nous révéler les résultats. Ce que n’ont pas manqué de noter les mauvais esprits qui y voient une gêne réelle du pouvoir. Et d’une, il n’a pu annoncer un bon taux tellement était évidente l’abstention.
Et de deux, la répartition des quotas a dû être plus difficile que prévue. Personne n’est obligé de croire ces mauvais esprits d’autant que la lecture des résultats n’a pas besoin de leurs perfidies. Les partis de la coalition, eux-mêmes, reconnaissaient la faiblesse de la participation.
Sur les ondes de la chaîne III, Harchaoui représentant le RND et la représentante du FLN accusaient les médias de ne pas avoir fait leur travail. Pour le premier, la presse a décrédibilisé l’APN en brocardant sa tendance à tout voter, pour la deuxième les journaux auraient dû mener des campagnes de sensibilisation. A l’une et à l’autre, on peut rappeler qu’ils ont suffisamment squatté depuis 2002 la télé, la radio, la presse publique et parapublique pour expliquer, à leur aise, toutes les vertus de la participation et de la Chambre des députés.
S’ils parlent des quelques journaux un peu critiques, ils reconnaissent donc le peu de poids de l’information-propagande à laquelle ils nous invitent, en dépit des poursuites judiciaires que leur gouvernement a engagées contre cette presse critique et en dépit des lois liberticides qui nous pendent, encore, sur la tête.
Faudra-t-il expliquer à ces grands partis que la liberté de la presse est la pierre angulaire de cette vie démocratie qu’ils disent avoir acceptée et que cette liberté est antinomique avec la propagande ? Les représentants des partis de la coalition ont vite trouvé le bouc émissaire, le coupable idéal, l’empêcheur de voter en rond qu’il faudra vite punir : la presse critique.
Ce discours est dangereux, très dangereux et il peut préparer de mauvais coups contre la liberté d’expression. Évidemment, dans leurs têtes, cette abstention n’est pas le résultat de leurs mauvais bilans économiques et sociaux, de leur piètre camouflage du chômage, de la mal vie et du désespoir des Algériens, de la corruption généralisée, du spectacle d’une APN qui accepte sans mot dire que Saïdani remercie le président de la République de l’avoir placé à la tête de l’Assemblée au lieu de remercier les députés de l’avoir élu, etc, etc. Mais leur rage provient d’autre chose. Cet échec cuisant leur assène des messages puissants sur les enjeux qu’ils ont mis au centre de cette élection et sur lesquels il faudra revenir demain.
MOHAMED BOUHAMIDI