Marketing de la peur

Le double attentat visant l’entreprise de BTP française Razel, près de Lakhdaria, traduit avant tout une poussée de la violence terroriste islamiste après des mois de relative accalmie. Il est aussi l’expression d’un marketing de la peur et de la recherche par le terrorisme algérien, labellisé Al Qaïda, de l’indicateur IBM le plus fort.

Il s’agit de cet Indice de bruit médiatique inventé par le français TNS Média Intelligence sur la base d’un classificateur composite qui intègre le volume d’informations et de commentaires consacrés à un sujet et le nombre moyen de lecteurs, d’auditeurs, de téléspectateurs et de navigateurs Web susceptibles d’avoir été exposés à ces informations. Cet attentat aura surtout éclairé de manière bien brutale le rapport entre le business international et le terrorisme. Le ministre des Affaires étrangères français Bernard Kouchner, qui est payé pour le savoir, a mis au jour cette relation en appelant les Français à continuer à travailler en Algérie, malgré les attentats.

L’argent, surtout quand il sent l’odeur des hydrocarbures, a toujours ses raisons que la raison humaine ne peut mépriser. Le diplomate français en vient presque à défoncer une porte ouverte en disant : «l’Algérie est un pays où nous [les Français] devons travailler, c’est un pays où nous travaillons, où les rapports commerciaux, amicaux, sont évidemment très importants.» On ne pouvait mieux définir le principe de réalité. Certes, Bernard Kouchner est parfaitement réaliste lorsqu’il rappelle que l’Algérie est tout de même «un pays dangereux». Mais il martèle ainsi une évidence dans la mesure où il y a avant tout des victimes. Toute chose étant relative par ailleurs, l’échelle de «dangerosité» est déterminée par l’appréciation différenciée de la violence endémique et du conflit armé, désormais de basse intensité, que l’Algérie connaît depuis 1992.

Après le double attentat de Lakhdaria, seconde tentative terroriste visant Razel en moins de dix mois, la société française s’est accordé le temps de la réflexion, légitime après le drame, avant de se décider à renvoyer sur ses chantiers en Algérie des personnels français. Mais gageons que le principe de réalité et la raison des affaires finiront par rattraper le management de cette entreprise en ces temps de concurrence mondialisée et de baril de pétrole tutoyant les cimes.

Nul doute aussi que l’intelligence vive de cet opérateur sait que les terroristes algériens, si rudimentaires et expéditifs que soient leur idéologie et leurs moyens, n’ignorent guère qu’ils vivent dans une société «informationnaliste», celle des médias de masse.

Qu’importent alors le sigle et le label lorsque les organisations terroristes, algériennes ou autres, sont une combinaison d’idéologies féodales et de technologies interactives comme Internet. D’où la recherche effrénée, compulsive, de l’indice IBM le plus élevé qui soit. La quête de ce repère devient souvent une fin en soi, surtout quand les attentats, forcément spectaculaires, mais parfois, hélas ! meurtriers, sont perpétrés dans des zones proches de la capitale.

Dans ce cas, Alger est utilisée comme une formidable caisse de résonance du fait qu’elle est le siège des principaux médias. Et même quand ces médias ont un déficit d’intérêt et de crédibilité aux yeux du grand public, ils sont toujours recherchés. Et ils le seront d’autant plus qu’ils travaillent souvent sous la pression de l’urgence ou usent parfois de la sinistrose comme argument de vente récurrent.

Noureddine Khelassi

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