A nos risques et périls

De ne pas être à l’écoute des spécialistes, les politiques dressent des projets aussi ambitieux qu’éloignés des réalités, décident de thérapies et médications aussi onéreuses qu’inefficaces, en un mot tracent des plans sur la comète. Au contraire, inviter des experts à établir le diagnostic sur tel ou tel domaine, c’est solliciter l’analyse précise, fouillée et surtout scientifique, c’est-à-dire ne s’embarrassant ni d’états d’âme ni de préjugés favorables ou défavorables sur la situation exacte de telle catégorie sociale, tranche d’âge ou secteur d’activité.

L’avantage des experts, comme ce fut le cas ce week-end à propos de la jeunesse, plus précisément les adolescents, est qu’ils sont au-dessus de toutes les considérations pseudo-morales ou idéologiques et n’obéissent à aucune injonction, calcul ou arrière-pensée politique, encore moins d’ordre partisan. Etre à l’écoute de l’avis d’experts, c’est courir le risque d’être choqué et traumatisé par l’étalage de la pénible vérité, mais souffrir face à la salve des faits est le prix à payer par qui veut s’écarter des rapports de complaisance et des constats qui caressent dans le sens du poil.

En outre, l’immense intérêt des experts est qu’ils sont, de par leur légitimité scientifique, au-dessus de tout soupçon de parti pris et des petitesses de la morale dominante sévissant entre les mains des bien-pensants. Ainsi, seule la légitimité scientifique d’un doyen de la faculté (ou d’une avocate de renom) leur confère l’aisance de s’exprimer publiquement en faveur de la réouverture des maisons closes, tout comme la stature d’éminent psychologue de renom permet de remettre en cause l’efficacité de la prison pour les adolescents, si ce n’est pour accentuer en eux le penchant pour l’agressivité et la violence et ce, sans s’attirer les foudres des gardiens du temple moral.

Il faut avouer, même pour les observateurs censés connaître un tant soit peu les causes des tourments juvéniles dans notre pays, que le constat est effrayant, hallucinant même, déclinant tous les facteurs de déviances que connaissent les ados, viols, délinquance, violence, suicides, extrémismes de toutes sortes, et bien sûr l’incontournable immersion dans le tourbillon de la harga.

Une énorme marmite est en train de bouillir dans les tréfonds de la société, sans qu’on n’y prenne garde ni n’y prête attention. Il est encore temps que ce bouillonnement soit canalisé par une prise en charge adéquate, sans quoi, à nos risques et périls…

Si l’on ne compte que les 15% d’adolescents (chiffres de spécialistes, le taux américain, espace d’agressivité par excellence, étant de 9% et la norme mondiale de 1%) à soigner en urgence psychologiquement mais qui ne le sont pas, qui vont donner libre cours à leur défoulement et qui vont se révolter contre leurs frustrations, il y a de quoi avoir froid dans le dos. Il y a péril en la demeure sur un danger latent qui couve dans les entrailles de la société algérienne, désastre qui pousse lentement et sûrement, parce qu’on ne le connaissait pas. Oui, mais maintenant, on sait…

Nadjib Stambouli

Leave a Reply

You must be logged in to post a comment.

intelligence artiste judiciaire personne algériens pays nationale intelligence algérie artistes benchicou renseignement algérie carrefour harga chroniques économique chronique judiciaire économie intelligence chronique alimentaire production art liberté justes histoire citernes sommeil crise alimentaire carrefour économie culture monde temps
 
Fermer
E-mail It