Premières ouvertures

Un grand écrivain, un talent méconnu à cause de son engagement politique s’est admirablement exprimé sur ce sujet. Ce grand spécialiste de Balzac, dont l’humour caustique orna pendant plus d’une cinquantaine d’années la «une» de L’humanité, avait imaginé un brillant discours qu’il prononcerait en cas de son élection tout aussi imaginaire à la très respectable Académie française.

André Wurmser (c’est de lui qu’il s’agit) explique dans un style très brillant les raisons pour lesquelles il ne sera jamais élu à l’institution créée par le ministre Richelieu: celle qui a fermé ses portes à des écrivains de talent comme Charles Baudelaire ou André Stil, tourné le dos à tous ceux qui ont l’esprit frondeur.

André Wurmser, dans son discours imaginaire de récipiendaire, démontrait que cette vénérable maison qui abrite des dinosaures nés pour la plupart sous la IIIe République, n’accepterait jamais sous le bicorne les pourfendeurs du capital et les défenseurs de la classe qui sue. Il affirmait que l’Académie française serait plutôt du côté de M.Thiers que de celui des Fédérés. On raconte même que l’éminent écrivain libanais Amin Malouf aurait été écarté de l’immortalité à cause d’une pétition qu’il aurait signée alors que d’autres, par prudence, ont évité d’y mettre leur griffe.

Cette institution, plusieurs fois centenaire, où a bâillé d’ennui le grand Clemenceau, est la gardienne vigilante de la grammaire et de la langue française contre une modeste indemnité, une notoriété toujours enviée et une immortalité qui reste à démontrer (de grands écrivains qui sont passés par là sont maintenant oubliés ou peu lus -, qui se souvient de Jean Richepin?) Les immortels qui l’habitent sont tenus de donner des cartes de séjour aux mots immigrés clandestins venus s’installer chez Molière: attention, c’est au cas par cas.

Les mots non désirables sont reconduits à la frontière et expulsés sans autre forme de procès. C’est certainement pour lutter contre la dictature de cette citadelle du conservatisme que les généreux frères Goncourt ont créé le prix qui porte leur nom et l’Académie chargée de distinguer les écrivains de talent et de progrès. Le prix Goncourt fait exploser les ventes en librairie.

C’est avec une certaine fierté que l’on apprend qu’elle offre un fauteuil à un écrivain maghrébin très populaire, peintre de destins modestes, Tahar Ben Jelloun. Ainsi la maison des Goncourt qui a distingué de grandes personnalités comme Malraux, répond à sa manière à l’Académie française qui a hébergé Assia Djebbar.

Un sacré doublé pour le Maghreb des plumes francophones!

Selim M’SILI

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