Des pays séparés face à des pays intégrés
Aucun pays maghrébin ne pourra réellement accéder à une autonomie stratégique du fait de son parcours en solitaire.
A la limite, un pays comme les Etats-Unis qui a des intérêts planétaires et qui dimensionne ses forces en fonction de ses ambitions peut approcher cette capacité à pouvoir se « débrouiller » tout seul, encore qu’il a besoin de l’alliance pour lui faire occuper des positions d’où sont absentes ses forces armées.
On dit que les Etats-Unis donnent une « finalité politique à l’expression de leur puissance ». Quelle finalité politique les pays du Maghreb en positions dispersées peuvent-ils donner à l’expression d’une puissance dont le rayon d’intervention est purement local ?
Sur le plan économique, ils ne peuvent pas faire la jonction entre leurs moyens et valoriser leurs atouts communs ou complémentaires. Au lieu de présenter un front commun, ils présentent des brèches préjudiciables à leur politique de développement.
Sur le plan militaire, ils ne poursuivent pas une politique de défense intégrée et la constitution de forces militaires également intégrées pour comme cela sied bien à des ensembles régionaux qui ont la conviction qu’ils auront à faire face à une menace commune.
Le refus d’une politique de défense intégrée signifie que l’ennemi n’est pas en dehors de l’espace maghrébin. Par contre, des politiques axées sur la recherche d’une autonomie stratégique et opérationnelle signifie que le voisin est l’ennemi stratégique, du moins celui-ci est-il perçu ainsi car il ne peut pas exister de politiques de défense, doctrine et évaluation du budget, sans identifier l’ennemi. Peut-il exister un plan de combat sans ennemi identifié et simulé ?
Serait-il possible que l’on puisse dire que des pays en développement et solitaires soient en mesure chacun d’entrer en concurrence contre des multi nationales, sur le plan économique ? Peuvent-ils, toujours en solitaire, rattraper les gains accumulés en termes de capacités à affronter la concurrence, par une Europe qui a mis au moins des dizaines d’années pour parvenir au niveau actuel et refaire le même parcours en quelques années par un simple programme de mise à niveau ?
Sur le plan de la défense, il est inutile de tenter une comparaison entre, d’un côté, l’Europe de la défense, encore que celle-ci soit en construction, et de l’autre côté des pays séparés qui s’équipent de l’extérieur alors qu’il serait possible de lancer une industrie commune d’armement sur la base d’une coopération civilo-militaire et qui serait hautement rentable pour faire avancer le développement industriel au Maghreb. Sur le plan économique, des pays intégrés ou en voie d’intégration se fixent des objectifs communs d’équilibres financiers à des échéances communes en une sorte de pacte de stabilité.
Ils s’imposent donc une discipline que n’ont pas des pays séparés. Comment alors comprendre que l’on soutienne des pays européenss pourtant rassemblés et solidaires qui sont en déclin et pas des pays séparés et divisés même tels les pays maghrébins ?
Bachir Benhassen