Etre attentif aux cris émeutiers

Il faut savoir parler des émeutes loin des émeutes, avec du recul et sans passion, loin du tumulte et hors des pressions. Tout comme il faudrait désapprendre à n’appeler à la vigilance citoyenne qu’au lendemain des attentats terroristes, il y a aussi lieu d’appréhender le phénomène des émeutes hors du boucan des sit-in, des odeurs âcres des bombes lacrymogènes et du brouillard enfumé des pneus brûlés.

Loin, également, des récupérations et de la manipulation politicienne et des infiltrations partisanes ou autres. Hors de tout ce magma, l’analyse se fait sereine, ce qui n’est pas synonyme de complaisance ou d’acceptation du fait accompli, encore moins de la dénonciation systématique du réflexe (c’en est un…) d’émeute.

Loin du climat passionné et ses ingrédients qui favorisent toutes les lectures à travers un prisme déformant, on peut poser la question essentielle : à quoi servent finalement les émeutes, c’est-à-dire à quoi aura servi le sacrifice des victimes et, accessoirement, les dégâts enregistrés ? La question ne s’adresse évidemment pas aux émeutiers qui, sauf les quelques rares cas qui agissent avec calcul et préméditation, se lancent dans la protesta violente avec spontanéité et sans réfléchir à la conséquence de leurs actes, juste pour tenter d’arracher quelques acquis à leurs revendications.

Ce sont bien sûr les pouvoirs publics qui sont interpellés pour qu’ils voient si réellement leurs promesses, lancées pour éteindre le brasier, sont bel et bien tenues ou si ce n’était que de la poudre aux yeux. Bien analyser les émeutes, c’est se rendre à l’évidence qu’aucun citoyen, jeune ou pas, ne se résout de gaieté de cœur à s’adonner au saccage et au lancer de pierre, mais qu’ils sont tous amenés à cette «solution» extrême faute d’écho à leurs doléances et revendications par les élus locaux et les commis de l’Etat.

Si quelques mois plus tard, une fois rangées les barricades et tues les scansions de mots d’ordre tapageurs, les citoyens se retrouvent exactement dans la même situation qu’à la veille des émeutes (voire pire, parce qu’entre temps, il y a eu la casse), il ne faut pas chercher midi à quatorze heures pour trouver la raison.

Si ce sont les mêmes autorités locales qui régissent la gestion de la ville, il n’y a aucune raison pour qu’il y ait le moindre changement, encore moins amélioration. Les mêmes personnes, les mêmes élus et mêmes commis de l’Etat reconduisent en toute évidence les mêmes méthodes, notamment celle de la politique de l’autruche.

Ou, pour rester dans le monde animalier, la politique des trois magots, rien vu, rien entendu, rien dit. Or, si les pouvoirs publics ne manifestent aucune écoute aux appels de la population et qu’ils s’obstinent dans l’attitude de la sourde oreille, ils optent pour la meilleure méthode d’encouragement aux retrouvailles avec les émeutes, certainement avec plus de violence. Le masochisme est en principe proscrit des idées directrices de la bonne gouvernance à l’échelle locale, mais le constat établi affirme l’exact contraire…

NADJIB STAMBOULI

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