La longue parenthèse estivale

En quelques mots, après avoir d’un revers de phrase rappelé qu’il n’est premier ministre que depuis 21 jours, Ouyahia a insisté sur l’absence de «priorité conjoncturelle», de l’égalité entre tous les secteurs, sans préférence hiérarchique de l’un sur les autres, non sans enfourcher sa monture préférée, le travail, auquel il dit bien sûr s’atteler, au lieu de parler.

Ouyahia, qui a donné toujours l’exemple en matière de labeur et d’ardeur à la tâche, seul terrain d’ailleurs sur lequel il est imbattable et inattaquable, alors que comme toute personnalité politique, il n’est pas au-dessus de tout reproche, est revenu à la charge, à propos de ses ministres, par une pirouette acrobatique dont il a le secret, puisqu’il dit qu’ils travaillent beaucoup, tout en les … exhortant à travailler davantage.

L’intérêt avec ce Chef de gouvernement, c’est son sens du concret et du palpable et son dédain des généralités. A titre d’exemple, il parle de retrousser les manches en cette période, mais sans oublier, ou plutôt en tenant compte, que c’est l’ère des congés et qu’elle sera suivie par le Ramadhan. Pour que ce tableau soit complet, la perspicacité de Ouyahia a omis de mentionner la donne estivale et caniculaire qui fait le lit de la paresse et du farniente et la joie des partisans du moindre effort.

Comme cette catégorie n’est pas dans notre Algérie en situation de pénurie, loin s’en faut, cela donne tout un pays en léthargie et en hibernation dans une atmosphère de torpeur et d’engourdissement généralisé et ce, non pas durant un jour ou une semaine, mais entre trois et quatre mois. Attention, ce constat, fort heureusement, n’est pas valable pour les travailleurs dans les champs et les ouvriers qui dans les usines ou sous les derricks irriguent de leur sueur la production de richesses matérielles, sans quoi le désastre aurait été intégral.

Mais tout l’environnement de la sphère productive proprement dite, surtout l’encadrement administratif qui en principe a pour rôle de gérer l’amont et l’aval du travail productif, se met en jachère, profitant du fait du prince, puisque les concernés ont un statut de décideurs.

A bien regarder, n’est-ce pas dans cette mise en retraite générale de toute une économie productive et ses compagnes de route financière et commerciale, pendant une durée de plusieurs mois, qui est à l’origine du maintien de notre pays dans le sous-développement, concept qu’on s’évertue vainement à édulcorer en lui substituant le doux euphémisme de «pays émergeant» ?

Il est quand même étonnant et intrigant que ce constat ne soit pas un élément nouveau dans notre «univers ergonomique», mais ce relâchement d’efforts se fait remarquer chaque été et chaque Ramadhan, depuis des décennies.

Devant ce gaspillage saisonnier, les pouvoirs publics restent passifs et dépourvus d’esprit imaginatif, pour ne pas dire de rigueur, acceptant au niveau de l’Etat un état de fait qui, somme toute, arrange les individualités au détriment de la collectivité. Accepter à chaque an que Dieu fait ce retour de la parenthèse n’est pas le meilleur service qui puisse être rendu à l’Algérie. Surtout lorsqu’on a l’ambition de lui ré inculquer la plus noble des vertus perdues, celle du travail et du sens de l’effort.

Nadjib Stambouli

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