Des taux pour escamoter le débat

L’euphorie était déjà dans l’air bien avant l’annonce des résultats du bac. A l’ouverture de la conférence nationale des directeurs de l’éducation, le 29 juin dernier à Ben Aknoun (Alger), M. Benbouzid avait simplement trouvé que le pays venait d’avoir un bac « parfait ».

Comprendre sans doute une session sans anicroches notables, sans les fuites et les menus scandales qui, il y a quelques années, alimentaient la chronique ordinaire de l’examen le plus marquant du cursus d’enseignement national.

Un satisfecit qui ne sera sans doute que conforté par les quelques points qui viennent d’être gagnés sur les taux de réussite de l’année dernière – plus de trois points selon les résultats officiels – puisque le secteur, à défaut d’objectifs pédagogiques vérifiables, s’installe dans une sorte d’obligation de résultats au sens statistique.

L’année, il est vrai, n’a pas été sans vagues. La grogne prolongée des lycéens, découvrant que la réforme et ses possibles tâtonnements se jouaient sur le terrain de leur génération, et surtout la montée au créneau cyclique et déterminée de syndicats autonomes, dans le propos global de la réforme de la Fonction publique, avaient mis à rude épreuve le département de Benbouzid, l’obligeant à des rectifications circonstancielles de son calendrier.

Mais ce que tous les ingrédients en présence avaient annoncé comme une année difficile dans l’Education est en train de se boucler sans histoire. Mieux, les turbulences vécues ne font que bonifier l’issue des examens de fin de cursus, puisque à l’hiver et printemps derniers, dans le feu de la protestation et du semblant de débat sur les réformes, les pronostics tablaient surtout sur des bégaiements sérieux à l’heure des bilans.

Les canaux officiels redoublent aujourd’hui de superlatifs, servis par des exemples qui doivent « dater » le passage d’une étape à une autre. Après les taux de réussite au BEM « les plus importants depuis l’indépendance du pays », s’enorgueillit-on, voilà d’autres « réalisations » au bac jamais égalées depuis que l’examen est algérien : des bacheliers avec des mentions inédites dans les annales scolaires et des moyennes proches du 19/20.

Autant d’atouts qui seront sans doute versés dans la panoplie argumentaire de la nouvelle réforme et sur laquelle le débat reste pourtant à faire. Car du bruit et des fureurs de l’année scolaire qui se termine, l’opinion n’aura retenu que les appels des lycéens à l’allégement des programmes et celui des enseignants à revoir leurs indemnités et salaires.

Sur ce qui engage l’avenir des générations futures et les contenus qui feront leurs références demain, l’on n’a pas vu s’opposer les stratégies et les options, y compris dans les cercles d’initiés censés remplir des missions de veille et de prospective – encore faut-il, certes, que ceux-ci aient droit de cité dans la mécanique engagée.

L’opinion est une nouvelle fois invitée à de banales comparaisons de taux statistiques sans les indicateurs qui renseignent sur leur signification réelle. Un saut qualitatif dont le ministère de l’Education se targue d’avoir au moins réalisé les conditions et que dément pourtant la réalité du terrain. A moins qu’il ne s’agisse simplement de transférer les problèmes de l’école vers l’université.

Mourad Slimani

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