Chronique : La stratégie des oubliettes
On avance lentement mais on oublie très vite, tel pourrait être le résumé de la captation du temps par la mémoire collective. La commémoration, discrète cette année, de l’assassinat de Mohamed Boudiaf en est un exemple mais il y en a d’autres, liés à la gestion des dossiers sensibles.
Si les autorités affirment que Malik Mejnoun, en détention depuis 1999, est bien l’assassin de Matoub Lounès, pourquoi attendre 10 ans pour annoncer que le jugement aura lieu le 9 juillet ? Va-t-il avoir lieu ? Que penser de Hassan Hattab, condamné par contumace alors qu’il dans un centre de détention à Alger ? Et où est Abderrezak El Para ?
Dans quelle prison se trouve Boumaârafi ? Que devient Hanane, la jeune fille accusée à tort de terrorisme ? Où en est Habiba, dont le procès est sans cesse retardé ? Est-elle en détention préventive ou dans une cellule blindée du Vatican ? Pourquoi n’y a-t-il pas de procès Bouricha ?
Que fait le général Beloucif depuis sa sortie de prison ? Où est Zendjabil ? Et Mouhouche, le jeune Testoza incarcéré dans l’affaire de la BEA dans laquelle était, entre autres, mêlé le fils de Chadli, que devient-il ?
Qu’est devenu le procès de la Cour des comptes intenté contre le président Bouteflika ? Pourquoi Khalifa n’est-il toujours pas extradé alors que depuis des années, tout le monde affirme, à commencer par le ministère de la Justice, que ce n’est qu’une histoire de quelques jours ?
Tout le monde le sait, la civilisation commence par la justice, fer de lance de la gestion intelligente et moderne d’un Etat humainement acceptable. Dans le cas de l’Algérie, la stratégie des oubliettes est toujours en vigueur.
Pour noyer un cas, pas besoin d’eau, il suffit de le laisser longtemps tout seul, il entamera rapidement sa biodégradation. A l’état de squelette, bien malin celui qui devinera qui a-t-il appelé avant de mourir. Par Djezzy ou Mobilis ? Crime privé ou étatique ?
Chawki Amari
