Vive l’informatique au primaire

Parmi les orientations données par Bouteflika au ministre de l’Education lors de la séance bilan-perspectives consacrée à ce secteur, figuraient en tête d’affiche trois défis à relever et à inscrire dans l’esprit et la lettre du prochain programme quinquennal 2009-2014. Il s’agit de l’enracinement identitaire par la langue et la culture, puis de la dispense d’éléments d’éducation civique pour réduire un tant soit peu l’incivisme criant qui sévit en guise de code de comportement, ce qui est une des séquelles de la période tragique connue par le pays, et enfin «la réhabilitation des filières scientifiques qui doivent prédominer dans le cycle secondaire», pour réduire la déperdition scolaire et le chômage des diplômés.

Les trois, inscrits dans le même faisceau de priorités, sont évidemment prioritaires et sont étroitement imbriqués et indissociables. Mais osons donner quand même un peu plus d’importance au troisième défi, celui qui, dans le respect des valeurs identitaires et civiques contenues dans les deux autres défis, va ancrer réellement l’Algérie dans les challenges technologiques du troisième millénaire, dans cette dynamique de modernité et même de post-modernité qui n’offre d’au-tre alternative que de s’y inclure ou de s’en exclure.

D’ailleurs, la directive de Bouteflika, sur ce registre, ne souffre d’aucune équivoque puisqu’il a instruit le gouvernement de veiller, dans le cadre du prochain plan quinquennal, «à doter l’Education nationale des ressources et moyens destinés à généraliser réellement l’enseignement de l’informatique et des nouvelles technologies de l’information à tous les niveaux de la scolarité, y compris au cycle primaire». Ce ne serait plus verser dans l’illusion et l’utopie que d’affirmer que si l’informatique est généralisée, en moyens et en compétences formatrices, dans le cycle primaire, et par conséquent dans tous les autres cycles qui vont suivre, l’Algérie sera sauvée et rien, ni de l’extérieur ni de l’intérieur, ne pourra l’inquiéter.

Miser sur l’informatique sans renier évidemment son socle identitaire, culturel, patriotique et religieux, c’est se délester de tous les boulets obscurantistes qui confinent toute la puissance spirituelle et morale de l’Islam à «la yadjouz» et, sur la lancée, créer une dynamique salvatrice, sous le sceau de la conviction et de la persuasion et non pas celui de la coercition et de la répression, pour démasquer tous les faux dévots qui, pourvus de leur seul potentiel d’ignorance, s’évertuent à régir la foi et le comportement des fidèles, tous à leurs yeux mécréants.

Mettre l’informatique dans l’école, c’est aussi une entreprise de correction d’une injustice sociale et une option pour le placement de tous les élèves sur un pied d’égalité, puisque nul n’ignore que toutes les familles relativement aisées (et c’est tant mieux) disposent au moins d’un micro, formidable appoint à l’enseignement scolaire, ce qui n’est pas le cas de la grande majorité des élèves.

L’informatique à l’école primaire, c’est le rêve devenu réalité, rêve d’une Algérie qui opère résolument un virage pour pénétrer un monde de repères et de savoir scientifiques, où prédomine la logique au détriment du charlatanisme fanatique. Mais il faudrait se garder de perdre de vue que dans la formule de Bouteflika, entre les mots «généraliser» et «enseignement de l’informatique», il y a le mot «réellement». C’est-à-dire loin du vernis démagogique et des professions de foi stériles.

NADJIB STAMBOULI