Des routes pour mourir

La nature humaine est-elle ainsi si mal faite? Lorsqu’au cours d’une même catastrophe, séisme par exemple, des milliers de personnes perdent la vie, l’émotion est à son comble. Le gouvernement, toutes affaires cessantes, se mobilise pour ne s’occuper que de l’événement. La population fait preuve d’une solidarité inégalée. Des mesures sont prises pour surmonter l’épreuve.

Pour secourir. Pour prévenir aussi. Comme par exemple de rendre obligatoires toutes les constructions à venir aux normes antisismiques. Le sujet occupe les esprits un certain temps. Puis, au fil des semaines, des mois, la préoccupation s’émousse. Les affaires courantes reprennent. Le train-train de la vie quotidienne reprend ses droits. Pourtant, chacun sait que «là où la terre a tremblé, elle tremblera».

Ainsi est faite la nature humaine. Le commun des mortels a peut-être le droit de se laisser aller dans cet ordre naturel des choses. Pas les responsables. Pas le gouvernement. Pas l’Etat qui a en charge la gestion de tout un pays. De tout un peuple. Cela peut paraître emprunter des sentiers battus que de rappeler que «gouverner, c’est prévoir». Pourtant, il n’y a rien de plus vrai. De plus essentiel.

Si pour un séisme, il en va ainsi, qu’en est-il des autres catastrophes qui n’ont rien de naturel! Comme les accidents de la route. Chaque année, c’est 4000 Algériens qui perdent la vie sur les routes. Deux ou trois fois plus de blessés dont beaucoup resteront invalides à vie. Cela dure depuis toujours sans que cela n’émeuve, outre mesure, ni l’Etat, ni l’opinion publique.

Il arrive qu’on en parle, c’est vrai. Qu’on stigmatise. Qu’on regrette. Sans que cela ne dépasse le stade de la conversation. Des sujets qu’on aborde lorsqu’il n’y a plus rien d’autre à dire. Pour meubler. Pour faire semblant de gérer. Un petit spot débile diffusé à la télé «puis s’en vont».

Est-ce dû au fait que la route tue par «unité»? A petit feu, oserait-on dire? Que les accidents de la route n’ont pas ce côté spectaculaire du séisme? Même si au final, le nombre des victimes est le même. Parfois plus important. Quelles que soient les raisons qui rendent la nature humaine si oublieuse et si exigeante de chocs pour réagir, les Responsables n’ont pas le droit de s’abriter derrière cet état. Ils n’ont pas le droit au statut de simples spectateurs à compter les morts. Ils ont l’obligation de trouver la ou les solutions pour, sinon arrêter le «massacre» du moins, le réduire.

Toutes les mesures ou semblants de mesures prises jusque-là, n’ont eu qu’un effet tout relatif quand ce n’est pas carrément absence totale d’effets. Les statistiques restent au même chiffre chaque année. Avec le nombre croissant de véhicules qui viennent s’ajouter au parc national et les infrastructures de base, comme l’autoroute Est-Ouest, qui se réalisent, il est à craindre qu’il faille, dans le même temps, agrandir les cimetières si nos gouvernants persistent dans leur position de l’autruche.

Il est tout de même extraordinaire de ne pas faire preuve facilement d’initiatives quand chacun connaît la première cause de ces accidents de la route. Tout le monde s’accorde à dire que c’est «l’élément humain». C’est-à-dire les chauffards et les piétons. Autant dire que le gouvernement «patauge» dans les solutions à apporter à cette première cause.

Ce ne sont pas les retraits de permis en ville ou les dos- d’âne, à l’entrée des agglomérations, qui viendront à bout de la catastrophe. En rase campagne, le terrorisme routier fait rage. Et si l’on y ajoute l’impossibilité d’installer des dos-d’âne sur les routes à grande vitesse et l’autoroute à venir, on se convainc de la fatuité des petites mesures prises jusque-là.

Quand on sait qu’il y a là un énorme travail de pédagogie à accomplir alors qu’il n’existe aucun Code de la route élaboré en recueil comme le Code civil ou le Code pénal en vente dans les librairies, on comprend mieux l’ampleur du problème.

Un problème qui commence dans les auto-écoles dont on ne sait sur quel recueil ils travaillent. Il y a là comme une inconscience criminelle.

Zouhir MEBARKI

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