Boycott’s blues

Lors d’un cours d’anglais au lycée chez la brave Mlle Jewell, qui nous venait d’Afrique du Sud et était une des premières militantes blanches de l’ANC, nous avions supposé que le mot « boycott » était composé de boy et de cottage ou cotton, pensant à quelque jardinier ou ouvrier du textile. Comme nous devions l’apprendre, il venait de Charles Boycott, grand propriétaire d’Irlande qui menait la vie dure à ses fermiers.

En 1879, ces derniers lui imposèrent un blocus et le ruinèrent (y compris de son nom) en créant le boycott. Popularisé par le mahatma Gandhi dans sa lutte pour l’indépendance de l’Inde, le boycott est une arme pacifique et parfois efficace qui est passée successivement du monde de l’économie à celui de la politique puis du sport et de la culture. C’est celle qu’a choisi le Syndicat algérien des éditeurs (SNEL), en refusant de participer au Salon du livre de Paris où Israël est cette année l’invité d’honneur (comme au Salon de Turin).

Quelques israéliens ont aussi opté pour le boycott comme le poète Aaron Shabtaï ou l’écrivain Benny Ziffer, chef de la rubrique littéraire de Haaretz, qui trouve « indécent que des écrivains israéliens viennent à Paris recevoir des honneurs pendant que des mères palestiniennes restent coincées dans le froid aux check-points. » Les appels des artistes et intellectuels palestiniens au boycott culturel semblent suivis. Ainsi, le Syndicat des comédiens égyptiens a examiné de près le cas d’Amer Waked qui a joué dans le docu-fiction Mésopotamie où Saddam Hussein est campé par un Israélien.

Il s’est avéré que Waked ignorait le fait durant le tournage en Tunisie. Souad Massi, en pleine tournée au Moyen-Orient en juin dernier, a dû démentir qu’elle devait se produire à Tel-Aviv, après Ramallah. Des dizaines de blogs l’en avaient accusée avant que la presse égyptienne ne la réhabilite. Pour sa part, Steven Spielberg, sollicité par la Chine, a décidé de boycotter les J.O. de Pékin à cause de la position de ce pays sur le Darfour. L’épreuve du 4 fois 35 mm est annulée.

Plus étrange, l’espèce de boycott que Makhlouf Boukrouh, spécialiste du théâtre, a décelé dans « le peu d’intérêt qu’accorde le citoyen à la culture et au théâtre en particulier » et qui serait la cause essentielle du « manque d’infrastructures culturelles à Alger ». C’est du moins ce qu’affirmait une dépêche APS, rapportant ces propos étonnants dans la bouche d’un chercheur sérieux.

Certes, Shakespeare n’est pas la tasse de thé de nos compatriotes mais ils ont montré plusieurs fois combien le théâtre les attirait. Alors que la capitale ne dispose que d’un seul théâtre, auraient-ils révolutionné la riche histoire du boycott en refusant de se rendre en des lieux inexistants ? On les savait inventifs mais là, ils nous épatent.

Ameziane Ferhani

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