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13 septembre 2008

Folles amours et fine lame

Ecrit dans : Chronique judiciaire

Se voyant probablement éconduit par sa vieille maîtresse, il prend une lame de rasoir entre les phalanges.

Nous sommes à la fin des examens de l’année scolaire 2007-2008 et à l’orée des grandes vacances. Aux alentours d’un grand établissement scolaire type construction coloniale, deux profs s’avancent sur le trottoir gauche, celui qui fait face au collège. Des ados se mettent en rang, attendent le coup de cloche habituel.

Salima S. et Mouna A. marchent côte à côte. Mouna n’a même pas le temps d’avaler le dernier petit morceau de croissant, qu’elle écarquille les yeux en voyant un très jeune homme dont on saura l’âge plus tard - vingt-quatre printemps, s’avancer et «caresser» la joue gauche de Salima qui avait ressenti une drôle de chaleur envahir son visage.

Des cris sont poussés par les nombreux passants à la vue des flots de sang jaillir de cette partie du visage. On court de partout.

Salima pleure, la main noyée de sang. C’est l’évacuation à l’hôpital. Des points de suture sont vite réalisés. Il y en aura une douzaine.

Le coup de la lame de rasoir est allé depuis le milieu de la joue jusqu’à l’autre moitié de la joue droite. Un drame.

Salima, quarante-deux ans, donne le nom de son agresseur. Elle le désigne comme un voisin qu’elle rencontre plusieurs fois par jour. Lui, va enfoncer le clou: «C’est ma femme», dit-il avant d’aller plus loin: «Elle m’a plaqué pour un autre.» D’ailleurs, il faut dire objectivement que Salima a l’âge de la maman de l’inculpé de coups et blessures volontaires à l’aide d’une arme blanche ayant entraîné une cessation de travail de plus de quinze jours. C’est le premier «os» que va rencontrer le jovial Nouredine Lasnami, le procureur chargé ce jour des réceptions de plaintes. Il entendra les deux parties.

Il apprendra ainsi par la bouche de l’inculpé, qui sera mis sous mandat de dépôt, qu’il était le mari de la prof qui possède un véhicule et était sur le plan financier le chef de famille.

Le «mari» ne manquait de rien. Lui, chômeur soutenant les murs et sa…«femme», ne se faisait point de souci jusqu’à ce mardi noir. Salima avait entre-temps constitué Maître Mohammed Bouaïchaoui l’élégant avocat d’Alger-Centre. Il n’aura pour toute demande que le dinar symbolique et un… châtiment exemplaire.

L’avocat tentera de convaincre sa cliente que la seconde demande relève du ministère public qui va justement requérir, le jour du procès en correctionnelle du tribunal de Sidi M’hamed - Alger, «cinq ans de prison ferme».

La juge ne va pas se faire des cheveux blancs en suivant les demandes du procureur et la brillante plaidoirie de Mâitre Bouaïchaoui, lequel va attirer l’attention du tribunal sur la gravité de l’acte commis en pleine rue à l’heure de l’entrée des collégiens et des élèves.

«Que de témoins oculaires. Certains jeunes resteront traumatisés longtemps à la vue du sang. Quelles que soient les motivations de l’inculpé, le délit ne peut se justifier. C’est pourquoi, dans un geste de magnanimité, ma cliente ne réclamera que la peine à infliger, en l’occurrence l’octroi du dinar symbolique», a lancé le défenseur qui va encore ajouter: «Force doit rester à la loi qui doit dominer celle de la jungle.»

Abdellatif TOUALBIA


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