Promesses

Quand le général Khaled Nezzar prit sa retraite, il sortit souvent de sa réserve pour mettre les pendules à l’heure ou rectifier les propos d’un ministre dont le point de vue est souvent déformé par le prisme du temps qui passe. Le temps qui passe! Voilà un facteur que souvent les gens qui pensent et agissent ne prennent pas suffisamment en compte pour juger de la faisabilité de leurs projets.

Jetés sur un papier avec des colonnes de chiffres qui font tourner la tête et ouvrir les appétits, tous les projets, des plus modestes aux plus mirobolants, séduisent le décideur tout autant que le crédule citoyen qui a déjà vu beaucoup de projets couler sous les ponts qui n’ont pas été encore réalisés. Et si le décideur est séduit, c’est bien souvent parce que le projet diffusé sur toutes les ondes, lui amènera un bref instant de répit dans la crise qui secoue violemment la société.

Donc, notre très respecté général avait avoué qu’il avait été séduit par le terme «économie de guerre» que le ministre des projets lourds avait employé pour impressionner son auditoire ou pour tout simplement, appuyer un projet qu’il avait sincèrement mûri pendant sa longue traversée du désert.

Tout cela pour dire que les termes à employer sont importants: si vous avez un général baroudeur en face de vous, il est naturel que les termes de guerre, tactique, stratégie, troupe, mouvements, génie, ratissage, encerclement, soient des termes propres à séduire l’interlocuteur.

Si vous avez un ecclésiastique, les termes de paix, d’âme, de repentir, de conscience, d’apaisement toucheront celui qui veut aider les autres à trouver le chemin de la béatification. Donc, la terminologie aussi vague soit-elle est importante.

Il ne faut donc pas s’étonner, qu’au moment où les émeutes secouent différentes cités de régions différentes, sous différents prétextes, des voix s’élèvent des rangs de l’Exécutif pour promettre aux citoyens la résolution de leurs problèmes les plus immédiats.

La lourde machinerie du complexe appareil administratif de Tayeb Louh a été mise en branle avec des orientations tous azimuts pour permettre aux jeunes chômeurs d’accéder à l’emploi. Les banques, les agences et les institutions ad hoc sont priées de coopérer.

Le prix de la viande ovine risquant de dégringoler, le gouvernement s’empresse de débloquer des fonds pour subventionner les aliments pour bétail; les éleveurs, les chevillards et les maquignons ont encore de beaux jours devant eux puisque l’importation de la viande ovine sera suspendue en été. De quoi promettre un Ramadhan salé!

Des mesures de soutien des prix sont décidées pour le lait, l’huile et la semoule pour assurer la paix sociale dans une atmosphère de libéralisation et de mondialisation.

On parle même de la construction d’une usine de voitures très prochainement: on oublie certainement que vingt années de négociations en pointillé n’ont pu décider Fiat à installer le fameux berceau de la Fatia dans la ville même de Habiba K. Ne connaissant pas le nom du constructeur, ni le lieu de l’implantation de l’usine, on ne peut que penser à la célèbre Mina IV dont un prototype a été présenté à Ben Bella en 1964!

Selim M’SILI