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24 mai 2008

Violences

Ecrit dans : On remet ça

L’officier de police donnait discrètement des ordres à ses collaborateurs tandis qu’un cordon de sécurité s’établissait autour du stade.

Plus loin, un groupe de jeunes à casquettes oranges et tee-shirts rayés de la même couleur, étaient groupés autour d’un bus: ce n’était qu’une opération de marketing d’une sauce célèbre chez ceux qui n’ont pas l’habitude de goûter à la viande.

«Dans quinze jours, cela va chauffer ici. Tu as intérêt à laisser ta voiture à la maison», m’avait dit Riyad, mon ami qui sans être un supporter sportif, savait de quoi il retournait puisqu’il habitait entre la mosquée où Ali Benhadj avait l’habitude de chauffer les foules et le stade qui devait servir d’exutoire à ces mêmes foules.

«Pourquoi donc tout ce remue-ménage?»

«Dans quinze jours, il y aura un match de football important: l’une des deux équipes risque la relégation. Alors, les supporters veulent peser de tout leur poids. Ils ont promis que cela va saigner».
Mon ami ne s’était pas trompé: dès vendredi très tôt, les colonnes de supporters convergeaient vers le stade.

Deux groupes antinomiques se sont affrontés d’ailleurs, au niveau de la Maison de la presse de Kouba.
Un petit fast-food en a fait les frais.

L’intervention des forces de l’ordre a eu raison des émeutiers mais la violence plane au-dessus du quartier. Elle est perceptible dans le regard des riverains qui se sont réunis en petits groupes pour organiser la riposte.

Déjà, du stade surchauffé montent les slogans des supporters surexcités.

Pourquoi toute cette violence dans une société d’où ne s’élèvent que des appels à la paix, que cela soit de la part du pouvoir ou de l’opposition larvée, rampante, masquée ou muselée?

Pourquoi tout est prétexte au déchaînement soudain des instincts les plus primitifs?

Une liste de logements mal attribués, une plage affectée à un privé spéculateur ou à des privilégiés méprisants, une route non goudronnée depuis des décennies, un gaz de ville qui n’arrive pas à quelques mètres de la conduite principale, des sinistrés de deuxième génération, des chômeurs contestataires, des hittistes quadragénaires, des refoulés de France et de Navarre, des syndicalistes non reconnus…

Ceux qui ont le génie de fermer d’un coup de stylo et d’un tampon bien ajusté les bars, les salles des fêtes pour cause de salubrité publique, ceux qui trouvent le temps de fermer les églises pour non-conformité avec la norme Iso, ceux-là devraient trouver l’intelligence de supprimer la précarité, le chômage, le désespoir, en un mot la pauvreté. Mais les circuits déconnectent et les relais sont en panne. Quant aux fusibles ils sont muets.

Selim M’SILI


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