Les gladiateurs et le justiciable
Ecrit dans : Editorial Expression
La polémique, qui a cours entre le bâtonnier d’Alger et le président du Syndicat des magistrats, ressemble à un combat de gladiateurs avec pour spectateurs les justiciables. Des gladiateurs dont l’un cherche forcément à terrasser l’autre. Un combat avec comme seul intérêt pour les spectateurs justiciables que la sauce que choisira le vainqueur pour les manger. Un combat en tout cas qui ne peut à lui seul réserver un meilleur sort au justiciable.
Car au final, c’est de cela qu’il s’agit. Lorsque Maître Selini accuse la justice de tous les maux, M.Laïdouni a raison de lui rétorquer que les magistrats n’ont point besoin de lui comme avocat et qu’ils savent se défendre. Deux professionnels de ping-pong qui savent se renvoyer la balle. Aucun débat sur la qualité de la justice rendue ne peut être productif sans participation du justiciable. C’est au profit ou au détriment, c’est selon, de ce dernier que la justice trouve sa raison d’être. Non à ses «artisans».
Cela dit, nul ne peut prétendre que notre justice fonctionne à merveille et qu’elle remplit sa mission de manière idéale. Que son indépendance est réelle. Qu’elle ne connaît ni les passe-droits ni les injonctions. Il ne se trouvera personne non plus pour affirmer sérieusement que les avocats n’ont rien à se reprocher dans l’exercice de leurs fonctions. Qu’ils prennent en charge des affaires sans aucun souci mercantile. Qu’ils sont animés par la seule passion de défendre. Que leurs compétences sont incontestables et pluridisciplinaires.
En réalité, le justiciable est pris en «sandwich» entre ces deux parties. Deux parties qui se parlent entre elles sur le sort d’autrui. Il arrive même qu’une certaine connivence s’installe entre avocat et magistrat sur le dos bien sûr, du justiciable. Car enfin et si tout le monde admet que certains jugements sont «arrangés», ce n’est certainement pas le justiciable qui a pu directement faire la tractation nécessaire. Les robes noires forment un cercle fermé et personne d’autre, encore moins le mis en cause (comme on dit dans le jargon judiciaire), n’a accès à la «cuisine». Quand on dit robes noires c’est au sens le plus large qui comprend également les greffiers et les huissiers. Le justiciable est tenu à distance de cette longue «courroie de transmission». Il n’a le droit que de s’exécuter et de subir.
A toutes les voix qui ne pourront s’élever pour s’offusquer de ce qui a été dit plus haut, une seule réponse: comment notre justice peut-elle échapper à des travers que celle des pays les plus avancés connaissent. Le dernier scandale hyper-médiatisé que nous a livré la parabole est l’affaire Dutroux qui a mis la France sens dessus dessous.
La seule différence toutefois avec ce qui se passe chez nous, est celle qui sépare l’exception et la règle. Tout le problème est malheureusement là .
Zouhir MEBARKI
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