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12 décembre 2007

MAIS QUE VEUT SARKOZY EN ALGÉRIE : Des affaires ou de l’amitié ?

Ecrit dans : Décodages

Le 10 juillet 2007, soit deux mois après son élection, le nouveau président de la République française Nicolas Sarkozy choisit l’Algérie pour son premier voyage hors Europe. Est-ce l’amitié ou plutôt l’esprit business qui a guidé ce choix de Sarkozy ? Pour qui connaît le personnage, ce serait plutôt la seconde hypothèse qui expliquerait la décision du président français.

Il le dit d’ailleurs lui-même à propos d’une problématique signature d’un pacte d’amitié adossé à des excuses de la part de la France pour violence coloniale. «… Pas d’état d’âme — je suis pour une reconnaissance des faits (coloniaux) mais pas pour le repentir qu’est une notion religieuse et n’a pas sa place dans une relation d’Etat à Etat.» Si l’on en croit Jean Daniel, le directeur du Nouvel Observateur, qui faisait partie de la délégation française venue à Alger ce 10 juillet, ce qu’il y aura de nouveau dans les relations Algérie-France tiendrait au tempérament et au style Sarkozy…

Peut-être à ses convictions (?) «C’est la première fois que j’entends un représentant de la France abandonner vis-à-vis de l’Algérie l’habituelle attitude de paternalisme complexé et de protection coupable pour ne voir en elle qu’une puissance égale disposant d’un immense territoire, de ressources considérables et objet de convoitises particulières. » Comme on aimerait bien partager avec Jean Daniel cette observation ! Mais que veut Sarkozy en Algérie ? Des affaires, pas de l’amitié ? Du gaz, pas de la chaleur humaine ? Beaucoup d’analystes le pensent. S’agissant de l’histoire de la colonisation, le nouveau président français, comme nous l’avons relevé, est prêt à en reconnaître les méfaits mais sans aller aux excuses et à la repentance.

Jacques Chirac y était pourtant prêt. Rappelons-nous les déclarations de l’ambassadeur de la Verdière qui a qualifié les massacres du 8 Mai 1945 (15 000 morts) de «tragédie inexcusable ». A la même époque le ministre algérien des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, enfonçait le clou et déclarait de son côté, lors de son voyage à Washington, que «face aux USA, la France n’a pas le même poids», rappelant à la France que l’Algérie ne veut pas de tête-à-tête et que d’autres partenariats… de poids sont possibles. Compliqué tout cela ? Mais oui : les relations Algérie-France ont toujours été compliquées. Dans le domaine économique les demandes de la France sont claires :

1) Assurer la sécurité de son approvisionnement énergétique et diminuer de sa sensibilité à l’égard de la Russie dans ce domaine.

2) Participer à la réalisation de l’ambitieux programme de relance de Bouteflika (180 milliards de dollars) et décrocher des marchés pour les entreprises françaises. La France veut «garder » son marché algérien face aux concurrents américains, chinois et japonais. Mais la France est-elle prête à s’engager dans un véritable partenariat de «prospérité partagée» que réclame l’Algérie ? En tout état de cause, dans ses relations d’affaires avec la France, l’Algérie a toujours eu des demandes précises. Ces demandes sont connues. Elles concernent les secteurs de la défense et la sécurité où la coopération avec la France est en retard. Elles concernent le partenariat économique de production et non pas seulement celui des échanges commerciaux. Et dans ce domaine, les «étonnements» de Mme Parisot, présidente du Medef, ne changeront rien à la réalité du terrain : le volume d’investissements français hors hydrocarbures en Algérie est faible, bien faible ! Les demandes algériennes concernent aussi le domaine de la formation d’une élite managériale pour laquelle l’Algérie demande à la France un accompagnement. Les demandes algériennes concernent enfin une plus grande fluidité, même contrôlée, dans la circulation des personnes entre les deux pays. Le nouvel ambassadeur de France en Algérie, Bernard Bajolet, semble avoir pris bonne note des demandes algériennes qui, pourtant, resteront sans réponses, comme nous le verrons plus loin. Lors d’un débat avec les journalistes algériens qu’il a tenu le 27 septembre à Alger, il a cru utile de dévoiler quelques éléments constitutifs de ce qu’il a appelé «la feuille de route» en préparation pour la visite de Nicolas Sarkozy du 3 décembre 2007. C’est ainsi qu’on apprend que dans le domaine de la coopération, les secteurs de l’énergie, de la formation et de la défense seront abordés. La France réalise 16% de ses approvisionnements en gaz à partir de l’Algérie.
Elle souhaiterait augmenter cette part et surtout assurer cet approvisionnement sur le moyen/long terme. En matière de formation, l’ambassadeur français a annoncé la maturation de trois projets :

1 - la mise en place d’une université algérofrançaise pour masters et doctorats ;

2 - la mise en place d’un institut supérieur de technologie ;

3 - le développement d’un partenariat avec les grandes écoles françaises pour la création de grandes écoles algériennes. L’ambassadeur de France a aussi indiqué qu’il n’est pas exclu que la coopération s’étende au domaine militaire et à la défense nationale. De même qu’elle pourrait concerner le nucléaire civil, comme l’a déjà indiqué le président français lui-même. Et vint la visite d’Etat de Sarkozy à Alger.

• Nous attendions des avancées concrètes dans le partenariat économique entre le Medef et le FCE, des contrats d’investissements français ou franco-algériens dans divers domaines, des programmes de coopération dans la mise en place de corporate universities qui formeraient les managers et les commerciaux dont a si besoin l’Algérie. Rien de tout cela.

• Nous attendions une assistance de la France dans la mise en place de pôles de compétitivité comme l’avait promis M. Estrozi, l’ex-ministre français de l’Aménagement du territoire l’an passé, à son homologue algérien Chérif Rahmani. Rien de cela.

• Nous attendions le développement de cette fameuse coopération décentralisée faite de jumelage entre collectivités locales françaises et algériennes dans laquelle les premières apporteraient leurs expériences et leur savoir-faire aux secondes dans différents domaines préalablement choisis en commun. Rien de cela.

• Nous attendions le fameux accord de partenariat renforcé couvrant une période de dix ans et annoncé par les proches de l’Elysée. Rien de cela. Pourtant, le président français n’est pas reparti les mains vides d’Alger puisqu’il a eu les assurances qu’il attendait quant à la sécurité d’approvisionnement énergétique de la France par l’Algérie. C’est même le seul domaine où des contrats ont été dûment signés. De même la France a obtenu de notre pays l’engagement d’une solide coopération dans le domaine sécuritaire et de lutte antiterroriste. Enfin, l’Algérie a su éviter tous les sujets qui fâchent permettant au président français de passer un séjour… tranquille. Alors la visite d’Etat de Sarkozy à Alger, une visite réussie ? Beaucoup d’observateurs en doutent et pour qui connaît la diplomatie algérienne, il faudrait patienter avant de tirer quelque bilan que ce soit. Mais on peut déjà noter qu’à Alger lorsque c’est la diplomatie qui gère un dossier, il faut considérer que la fin de l’épisode est encore lointaine et incertaine, y compris pour ceux qui croient avoir engrangé des succès.

Abdelmadjid Bouzidi


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