La guerre froide est réchauffée
Ecrit dans : Le Point
Le double attentat suicide contre Benazir Bhutto et son bilan de dizaines de morts, sont un événement révélateur de la réactivation de la guerre froide que se sont de tout temps livrés les deux super-puissances, comme toujours par pays tiers interposés. Incriminer El Qaida, l’actuel régime de Musharaf ou les partisans de l’ancien dictateur Zia U Lhaq, ne saurait absoudre les « deux grands » d’une implication directe ou indirecte, les foyers de tension étant leur terrain de prédilection pour attiser les divisions fratricides et en tirer les dividendes d’influence, au détriment de l’ennemi permanent et viscéral.
Et ce, par delà les changements de façade survenus depuis l’effondrement du mur de la honte et la dislocation du rideau de fer. En fait, depuis quelques semaines, on assiste à un réveil de la guerre froide, par le placement de jalons édifiants quant à l’intensité de la sourde bataille, par nature sournoise, pernicieuse et jamais frontale.
Ainsi, quelques jours à peine après avoir reçu Sarkozy avec un enthousiasme d’une chaleur sibérienne, Poutine s’en est allé en Iran rencontrer Ahmadinejad, et ainsi narguer les Etats-Unis, qui à leur tour se vengent en accueillant le pire ennemi de… la Chine, le Dalai Lama et en le comblant de distinctions, dans une ostentation cérémoniale qui frise la provocation.
Sont-ce là les prémices d’une élévation de ton entre puissances, dans un chassé croisé triangulaire, elle-même prélude à des frictions qui deviendront conflits ? Il se trouve qu’en guise d’accompagnement de ces échanges d’amabilités, il se constate sur les médias occidentaux, une vaste campagne d’intox et de dénigrement sur tous les produits en provenance de Chine, que des « enquêteurs » zélés et autres commis reporters s’évertuent à faire passer pour des poisons par ci et des jouets dangereux par là .
L’extraordinaire vitalité économique de la Chine qui bat tous les records de productivité, comme si le géant longtemps endormi rattrapait le temps perdu, ainsi que la baisse des prix qui va avec, fait craindre le pire aux entreprises occidentales en matière de concurrence. La riposte, à défaut de se faire par la délocalisation qui semble « trop » mutuellement bénéfique, se déploie sur le terrain de la désinformation, qui est une guerre froide comme une autre, du moins froide pour le moment.
Celle que le monde risque de vivre, au vu de quelques signes précurseurs, ne ressemblera évidemment pas à la guerre froide précédente telle que vécue entre les années cinquante et quatre vingt, puisque le combat purement idéologique n’est plus de mise, mais la bataille va se déplacer sur le terrain économique. L’élément réellement nouveau est l’intrusion de la Chine, qui désormais n’a plus le livre rouge et les pensées de Mao à promouvoir par la propagande.
Par contre, ce pays immense par son poids démographique et son impressionnant potentiel économique a dorénavant des intérêts économiques et financiers à défendre partout dans le monde, ce pourquoi il aura de plus en plus tendance à peser de tout son poids dans les sommets politiques. Jusque là zone tampon et facteur d’équilibre, l’Europe peut basculer dans un camp, faisant ainsi basculer non pas le rapport de forces mondial, mais le risque d’exaspération des arguments de guerre.
La Grande Bretagne avait de tout temps marqué son territoire, celui d’un Etat parmi les Etats-Unis. Il restait la France comme lieu de résistance contre l’hégémonie des Etats-Unis. Puis vint Sarkozy…
Nadjib Stambouli
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